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Lire: Courteline de Jacqueline Blancart-Cassou

Un écrivain comique et misanthrope nommé Courteline

Lorsque le nom de Courteline est aujourd’hui évoqué, c’est souvent pour dénoncer une situation absurde, la plupart du temps en rapport avec l’administration ou une quelconque autorité institutionnelle. Si ce réflexe est parfaitement fondé, on ne saurait cependant réduire Georges Courteline à cette seule disposition.

La vie de Courteline enjambe les XIXe et XXe siècles. Né en 1858 à Tours de Jules Moineau, vaudevilliste à succès, Georges est élevé chez ses grands-parents, il vit ensuite une enfance peu heureuse à Paris, où il passe ses étés à Montmartre, puis sera interne au collège de Meaux pendant six années, séjour triste et pénible pour lui. La liberté retrouvée, Georges se dissipe passablement pendant ses études secondaires et échoue à la seconde partie du baccalauréat.  A vingt ans, l’armée le réclame et il effectue sept mois d’incorporation avant d’être réformé ; comme pour l’internat, il gardera de nombreux souvenirs de sa brève expérience sous les drapeaux, lesquels lui serviront à alimenter son œuvre. Grand admirateur de Catulle Mendès, qui deviendra son ami et mentor, Courteline se consacre à la poésie, mais comme il lui faut vivre, il devient employé de bureau à la direction générale des Cultes… où il se montre bien peu assidu ! Il fonde la revue Paris-Moderne (qui contribue au retour de Paul Verlaine), écrit des chroniques dans de nombreux journaux et fréquente Montmartre, avec ses cabarets.

En 1886, grâce à l’entremise de Catulle Mendès, Courteline entame une carrière d’écrivain. L’ensemble de ses chroniques sur la vie de caserne est publié sous le titre « Les gaîtés de l’escadron », satire féroce sur le sort peu enviable du soldat. Moins acerbe et plus comique, « Le train de 8h47 », publié en 1891, se déroule également au sein du milieu militaire et constitue l’une des œuvres relativement longue de Courteline, habitué aux brèves chroniques. Après l’armée, Courteline décrit les méandres de la bureaucratie dans le célèbre « Messieurs les Ronds de Cuir », s’appuyant sur un continuel contraste entre l’élégance recherchée de l’expression et la trivialité du sujet.

  En 1892, Courteline fait ses débuts de dramaturge et s’éprend d’une comédienne, Suzanne Berty, avec qui il mène une vie de bohème incroyable ; elle lui donnera deux enfants. Il écrit plusieurs pièces à succès évoquant le couple,  « Boubouroche », « La peur des coups » ou moquant la police  et la Loi : « Le commissaire est bon enfant », « Les Balances ». Epuisée et malade, Suzanne meurt en 1902 à l’âge de trente-trois ans, laissant Courteline dans le désarroi. Il se réfugie dans l’écriture, avec un pastiche insolite de Molière, puis une pièce plus amusante, « La Paix chez soi ». C’est à cette période qu’il rencontre Judith Bernheim, qu’il décide d’appeler Marie-Jeanne et qui partagera sa vie jusqu’à sa mort.

Courteline écrit un roman très travaillé (et misogyne) « Les Linottes » en 1912 et offre un recueil singulier de remarques, d’observations et d’aphorismes sur lui-même, la vie et la littérature avec « La Philosophie de Georges Courteline », en 1916.

Malade, amputé des deux jambes, Courteline connait une fin de vie douloureuse. Il s’éteint le 25 juin 1929, à soixante et onze ans, laissant une œuvre abondante et toujours actuelle à bien des égards. Vouant respect et admiration pour ses parents, follement attaché aux deux compagnes de sa vie, ami fidèle, révulsé par les tueries de la guerre, amoureux des animaux, tel fut Georges Courteline, fâché contre le monde entier, ses règlements et ses lois, en colère contre l’absurdité.

Après Feydeau et Labiche, une nouvelle biographie en tout point réussie de Jacqueline Blancart-Cassou.

Titre : COURTELINE
Auteur : Jacqueline Blancart-Cassou
Collection: « Qui suis-je ? »
Éditeur : PARDES
Prix : 12,00 euros

Arnaud Robert.

ar@infos-75.com

courteline

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