Goûts/Saveurs

Tribune libre:Scandaleux : le vin chilien, boisson « officielle » du Tour de France 2016 !

 Christian Prudhomme, le patron du Tour, feint de s’étonner de l’indignation des viticulteurs…
  Depuis 2009, le Paris-Dakar qui ne « rallye » plus Paris se déroule en… Amérique du Sud. Il faut, paraît-il, céder aux sirènes de la mondialisation, et tant pis pour la géographie. Ainsi, depuis la fin des années 1980, le Tour de France s’est lui aussi « mondialisé ». Par ses participants, d’abord : équipes étrangères drainant avec elles le fric et le dopage. Par le circuit, enfin, devenu très européen. On part maintenant chaque année (ou presque) de Belgique ou de Grande-Bretagne, on traverse la Manche, et pas en pédalo. Cette année, nos coureurs vont explorer la Suisse sous l’œil attendri de la vache Milka avant d’aller faire un tour en Andorre et en Espagne.

Mais il y a plus grave : l’ASO (Amaury Sport Organisation) a choisi comme vin officiel de cette 103e édition un vin chilien, la cuvée Bicicleta, produite par le Chilien Cono Sur. Ça prête certes à rire mais ce n’est pas une blague et l’on imagine l’impact de cette annonce en plein Salon de l’agriculture, le monde paysan traversant actuellement des moments particulièrement difficiles !

Christian Prudhomme, le patron du Tour, feint de s’étonner de l’indignation des viticulteurs, arguant que cet accord mettant le vin chilien en vedette pour les Tours 2016 et 2017 a été signé en 2014. Ce qui est tout sauf une excuse car la situation des producteurs français du Sud-Ouest était alors carrément critique !

La vraie raison, tout comme les visites hors frontières, c’est le fric et rien d’autre. Les Chiliens ont posé un gros chèque sur la table, ce qui balaye tous les arguments du monde. Exit la défense du patrimoine, des terroirs et de la culture française… Le vélo est devenu comme le foot ou le tennis : une gigantesque histoire de pognon.

Mais les viticulteurs du Sud-Ouest et de l’Aude se rebiffent. Ils ont menacé de s’inviter dans l’étape Carcassonne-Montpellier le 13 juillet prochain, histoire d’y mettre un peu d’ambiance. Le sénateur Roland Courteau, au nom du groupe des Amis du Tour de France, a demandé lui aussi des explications : « Par quel étrange cheminement a-t-on pu en arriver à ce qu’un vin chilien supplante des vins de France sur le Tour de France ? », soulignant « la très grande émotion soulevée dans les milieux viticoles et au-delà, et la très forte réprobation qu’une telle information a pu susciter ».

La direction du Tour s’est déplacée jeudi au Salon de l’agriculture pour rencontrer le président du Conseil viticole de FranceAgriMer. Elle propose aux vignerons de venir présenter leurs productions au Village du Tour, mais l’initiative se heurte cette fois à… la loi Évin, qui interdit la publicité pour l’alcool. Loi que le Chilien Cono Sur peut se permettre de contourner puisque les grands départs du Tour de France s’effectuent… à l’étranger. Il suffisait d’y penser.

Bref, une vraie histoire de fous, bien française en somme

Marie Delarue
Écrivain, musicienne, plasticienne
source Boulevard Voltaire

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