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Photos de s*xe non sollicitées : ce que révèle l’analyse psy d’Inès Perrot.

Transgression du consentement, quête narcissique et domination digitale : l’analyse sans filtre d’Inès Perrot, psychanalyste et experte JOYclub.fr

Photo du pénis (dickpic) : JOYclub.fr décrypte les mécanismes psychanalytiques d’un phénomène qui persiste

Dans un contexte où le harcèlement en ligne prend des formes de plus en plus variées, l’envoi de photos non sollicitées de pénis demeure une pratique massive et pourtant mal comprise. Selon plusieurs études récentes, près d’une femme sur deux aurait déjà reçu une photo de pénis ou « dick pic » non désirée au cours de sa vie numérique. Face à ce phénomène persistant, JOYclub.fr, s’est attelé à réaliser une analyse psychanalytique approfondie pour comprendre les ressorts profonds de cette pratique. Inès Perrot, psychanalyste, hypnothérapeute et experte JOYclub.fr, déconstruit les mécanismes psychiques qui poussent certains hommes à envoyer des « dick pics » non désirées.

La dick pic : bien plus qu’une simple photo inappropriée

« Si elle est une pratique répandue au point d’avoir un terme qui lui est consacré, la dick pic n’en demeure pas moins un mystère pour beaucoup et en particulier pour celles et ceux qui les reçoivent », explique Inès Perrot. « Autant, prise avec esthétisme et dans le but d’émoustiller, une photo sexy de son partenaire peut s’avérer érotique, amusante et excitante, autant lorsqu’elle arrive de manière impromptue et surtout indésirable, cela est vécu par le récepteur comme une intrusion voire une agression ».

Cette distinction est fondamentale : le problème ne réside pas dans la nudité ou la sexualité en soi, mais dans l’absence totale de consentement. La photo de pénis non sollicitée s’inscrit ainsi dans un continuum de violences qui va du harcèlement de rue à l’exhibition, transposé dans l’espace numérique.

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La transgression du consentement comme source de jouissance

L’analyse d’Inès Perrot met en lumière une dimension psychanalytique rarement évoquée dans les débats publics. Selon elle, « envoyer une photo sexuelle non demandée revient avant tout à franchir une limite. L’acte s’inscrit dans une logique de transgression : là où le désir pourrait se nourrir de réciprocité, il se construit ici dans l’interdit et le passage en force. Le plaisir ne réside pas tant dans le contenu de l’image que dans le fait même de l’imposer, de forcer l’autre à recevoir ce qui n’a pas été sollicité ».

La psychanalyste poursuit : « Freud décrivait déjà la sexualité comme structurée par l’interdit et la loi symbolique. Envoyer une image sexuelle sans demande préalable revient à dénier cette loi et à s’affranchir du cadre du consentement. L’excitation se déplace alors de l’objet sexuel représenté vers l’acte lui-même : c’est le franchissement de la limite qui devient source de jouissance ».

Cette analyse révèle que la photo de pénis participe d’une sexualité non pas relationnelle mais narcissique, où l’autre n’existe que comme support de projection fantasmatique.

L’exhibitionnisme digital et la pulsion d’emprise

« Au-delà de l’excitation sexuelle, l’envoi non consenti peut s’apparenter à une forme d’exhibitionnisme digital », analyse Inès Perrot. « L’écran devient un substitut à l’espace public : l’expéditeur tire gratification du fait de s’exposer, mais surtout d’imposer cette exposition. L’autre n’a pas le choix de détourner le regard : il est contraint de devenir spectateur. Cette absence d’échappatoire nourrit une dynamique de pouvoir, où l’un s’affirme en sujet actif et l’autre est réduit à l’objet récepteur ».

L’environnement numérique facilite cette transgression en créant une distance physique et un sentiment d’impunité. L’anonymat relatif du digital permet de s’affranchir des conséquences sociales immédiates que produirait un tel acte dans l’espace physique.

« La dick pic trouve son écho dans la description freudienne de la pulsion d’emprise », poursuit la psychanalyste. « L’envoyeur n’agit pas tant pour partager que pour capturer : ce qui est recherché, c’est le regard de l’autre, pris en otage ».

La quête de validation narcissique

L’analyse révèle également une dimension narcissique profonde : « L’envoi d’une image sexuelle imposée peut également être compris comme une tentative de validation narcissique. Ici, l’autre n’est pas seulement réduit à un spectateur forcé, mais à un miroir censé refléter l’image de toute-puissance que l’expéditeur veut imposer », explique la psychanalyste. « Même la répulsion peut faire office de confirmation, car elle prouve que l’image a atteint son but, qu’elle a marqué et forcépage2image20389184l’autre à réagir. Une réponse, même négative, suscite quelque chose et vaut mieux que l’ignorance ».

Cette recherche de réaction à tout prix illustre une forme de détresse narcissique : l’incapacité à supporter l’indifférence ou le non-regard. La photo de pénis devient alors un cri paradoxal, violent certes, mais aussi révélateur d’une fragilité identitaire profonde.

Une problématique profondément ancrée dans la domination masculine

L’analyse d’Inès Perrot replace le phénomène dans son contexte sociologique et historique : « Des siècles de domination masculine et de patriarcat nous ont enseigné une chose : la place prépondérante de l’homme dans les rapports de séduction et celui de la simple « réceptivité » de la femme », souligne-t-elle. « Il est donc par extension normal que l’homme soit actif. Il choisit, agit et domine alors que la femme, elle, accepte d’être le réceptacle des pulsions masculine dans une forte notion de passivité ».

Cette construction sociale explique pourquoi la photo de pénis cible quasi- exclusivement les femmes : elle s’inscrit dans une logique de réaffirmation de la domination masculine à travers la démonstration phallique. L’acte n’est pas seulement sexuel, il est politique.

« Dès petit, les garçons sont habitués à comparer et on leur enseigne une pudeur bien différente de celle imposée à leurs homologues féminines », ajoute Inès Perrot. « Là où on apprend à une femme à se « cacher pour se protéger », ce qui engendre souvent des comportements plutôt pudiques, le petit garçon se promène nu et plutôt fier de sa condition et de son attribut. Il y a déjà les prémices d’une forme de jouissance à imposer sa présence ».

Le digital comme nouveau terrain d’expression des pulsions

« En définitive, la dick pic non sollicitée dépasse de loin le simple envoi d’une image indésirable : elle engage des mécanismes psychiques profonds entre transgression et jouissance narcissique », conclut Inès Perrot. « En contournant la loi du consentement, l’expéditeur n’est pas en quête d’une rencontre érotique mais de l’affirmation de sa puissance, en réduisant l’autre à un objet captif de son regard ».

La psychanalyste poursuit : « Cet acte n’est pas uniquement un geste de domination, mais aussi une tentative, paradoxale et violente, d’obtenir une preuve d’existence à travers le regard de l’autre. L’acte ne réside donc pas seulement dans un « mauvais usage du numérique » mais il réactive des logiques profondes : exhibitionnisme, pulsion scopique, emprise narcissique, négation du consentement qui sont finalement des problématiques de toujours de l’être humain. Le virtuel est simplement un nouveau média dont l’anonymat libère l’individu de la punition et lui ouvre donc la voie à l’expression de la pulsion ».

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