Habituellement, les auteurs français de polars ne nous dépaysent pas beaucoup L’action se déroule toujours dans l’hexagone et un trajet Clermont-Bénodet aller-retour s’effectue dans la journée avec une 205. Caryl Férey nous fait voyager en Amérique Latine, en Argentine plus précisément. L’histoire de ce pays, particulièrement mouvementée, fournit à l’auteur une trame extraordinaire où le passé s’entrechoque avec le temps présent. Ruben, le héros, est un détective dont la principale occupation consiste à retrouver les disparus.
Il travaille pour les « madres » de la Place de Mai à Buenos Aires. Le coup d’état du criminel de guerre Videla et de ses nervis en 1976 a commis de telles atrocités que le souvenir des opposants jetés des avions reste encore vivace. Aujourd’hui encore il subsiste quelques nostalgiques de l’ESMA, l’école de mécanique de la Marine, sinistre lieu de torture.
Ruben se retrouve vite sur leur piste, aidé par Jana, une Indienne Mapuche, parfois appelée « Pampa » pour son absence totale de poitrine. Elle s’est adressée à Ruben car elle n’a plus de nouvelles de Luz, une amie travestie. Ruben accepte de l’aider et le roman prend son envol en se transformant en une sorte de road-movie. D’abord dans une vieille Ford, puis une Hyundai ils nous font traverser l’Argentique en évoquant les années sanglantes de la dictature ou la guerre des Malouines, île très proche du pays mais accaparée par le Royaume-Uni. Avec Jana, Ruben prend aussi conscience de la cause des Indiens dont les terres ont été pillées et qui restent des parias en Argentine. Ils forment très vite un couple très lié et parviennent à confondre les meurtriers. Ce roman se lit avec facilité grâce à une écriture très claire et une intrigue menée de main de maître.
Ce livre toute les chances de donner naissance à un scénario.
Un thriller original et passionnant.
450 pages, Gallimard, 19,90 €
Dominique LE FUR
