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Lire : Kryptie les services secrets de Sparte, Jean Bataille

Qu’est-ce donc que cette Kryptie qui semble être un mystère pour les spécialistes de la Grèce antique ?

Assez jeune, j’ai été, dans le cadre de la défense de mes idées, un spécialiste de la contre-subversion. À l’époque, 1970-1985, le danger était bien réel et après quelques aventures, je me suis retrouvé en prison et c’est pendant mon incarcération que j’ai vraiment pu me consacrer à la lecture des textes de Platon, Plutarque, Xénophon et d’autres auteurs de la Grèce antique. Plus tard, grâce aux historiens et aux services de documentation de mon université, j’ai compris qu’il s’agissait des services secrets de Sparte et de la mise en œuvre par les Spartiates d’une des formes de la mètis, l’intelligence rusée, associée à une utilisation canalisée de la violence.

Est-ce que les Grecs qui ont tout inventé en matière de philosophie, de mathématiques, de médecine, de navigation, d’architecture avaient aussi une pratique sophistiquée de la fonction secrète ?

Sparte, système d’ordre conçu pour « être et durer » créa des formes politiques originales qui lui permirent de combattre impitoyablement tout ce qui pouvait présenter un danger pour l’État. Elle y intégra la fonction secrète par obligation comme un mal nécessaire à la survie de la cité pour au départ combattre la guérilla des Messéniens. Elle l’organisa, la mit en pratique et lui donna un nom, Kryptie.

La Kryptie des Spartiates aura suscité les commentaires les plus divers des spécialistes du monde grec antique sans qu’une réponse précise et globale soit apportée. L’étude de la Kryptie m’aura occupée une quinzaine d’année et je pense avoir résolu l’énigme en partie.

Comment pouvez-vous être sûr de la validité de votre thèse ?

À force de travailler le sujet… Ils parlaient déjà à l’époque de contrôle de population, de guet-apens légal, d’entraînement et de préparation à la guerre, de mission de défense et de garde du pays, d’exercice militaire, de guérilla, d’éclaireurs, de fantassins léger, d’espionnage et de police secrète, mais les études universitaires sur ce genre d’activités n’existaient pas à l’époque et ils n’ont pas cherché à développer leur raisonnement. Au XXe siècle, tout un courant d’historiens que l’on pourrait qualifier de marxisant aura mené une formidable opération de subversion et de falsification à l’encontre de la recherche historique. Ils se seront attachés, pour des raisons idéologiques, à vider la Kryptie de sa substance, soit en la limitant à des rites d’initiation, de passage ou de puberté soit carrément en la dénaturant complétement allant jusqu’à parler d’enlèvement pédérastique. La terre a dû trembler aux Thermopyles car parmi les Trois cents, il y avait probablement un bon nombre de Kryptes.

Quels enseignements pourrait-on tirer de cette étude sur la Kryptie ?

Les Grecs avaient sacralisé et divinisé ce concept sous le nom de Poros. Fils de Métis et père d’Éros, il fut conçu avec Pénia, la pauvreté. Platon le décrit comme le moyen de parvenir au but. En ce qui concerne le krypte on pourrait parler d’expédient qui permet de remplir sa mission. En ces temps de retour du tragique, la figure du krypte nous interpelle. Et d’ailleurs, pour les amateurs de symbolique, comment ne pas voir dans l’histoire du jeune spartiate qui se laisse dévorer le ventre par un renard plutôt que de parler, une allégorie destinée à faire comprendre et admettre que la Kryptie comme forme de l’intelligence rusée implique, sur le plan mental et physique, un don total de sa personne, la conservation absolu du secret et une résistance stoïque allant jusqu’au sacrifice de sa propre vie.

Cet ouvrage sur la Kryptie peut être appréhendé comme une arme de guerre psychologique contre les forces de la subversion et comme action psychologique au bénéfice de notre continent.

Kryptie. Les services secrets de Sparte, Jean Bataille, préface de Jean Haudry, éditions Dualpha, collection « Vérités pour l’Histoire », dirigée par Philippe Randa, 428 pages, 41 euros.

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