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Patrik Weber l’Aiglon ne manque pas d’aire

Connaissez-vous Patrick Weber ?

Et si l’on vous dit Stéphane Bern ? Alors, oui, bien sûr…

Eh bien, Patrick Weber, c’est l’alter ego de notre Stéphane Bern national… en Belgique !

Animateur de radio, de télé, écrivain, historien et chroniqueur des têtes couronnées, tous nos amis belges le connaissent.

Mais nos lecteurs parisiens ne devraient bientôt plus être en reste car Patrick Weber est aussi cet amoureux invétéré de notre bonne vieille capitale qui a choisi – avec quel talent iconoclaste ! – d’exprimer sa passion par la voie littéraire avec un charmant petit polar inattendu et sympathique : L’Aiglon ne manque pas d’aire*.

L’intrigue en est pour le moins originale : l’Aiglon – le duc de Reichstadt – aurait eu un fils, ce qui chamboule la succession dynastique de Napoléon ; secret qui semble bien gardé puisque ceux qui s’en approchent disparaissent dans des circonstances bizarres. Bien sûr, le personnage principal – un jeune antiquaire au nom prédestiné de Valdémar Aigle (!) –, tombera sur le pot-aux-roses et toutes sortes de calamités du genre farces-et-attrapes morbides vont alors s’abattre sur lui.

L’histoire est bien menée, cocasse, avec parfois une pointe d’angoisse décalée, et, surtout, les protagonistes sont truculents. Qu’on imagine : un Fred Lejaune, un Lucien Michepape et confrères, tout droit sortis d’un guignol noir revisité, il y a du Marcel Aymé mâtiné de Pierre Gripari chez notre auteur. « Valdémar songea que la destinée n’avait pas été aussi mauvaise avec Lucien Michepape. Elle lui avait épargné d’avoir été découvert par le dénommé Fred, le nez dans la confiture de coings. Et d’ailleurs, il avait raison, le vieux, c’est délicieux les coings ! » Voilà comment on découvre un cadavre chez Weber !

À la lecture de ce joyeux roman, on ne peut s’empêcher aussi d’évoquer Simenon – encore un Belge qui sut illustrer Paris –, car, disons-le, cette enquête déjantée qui nous entraîne dans les venelles d’un Marais authentique et magnifié – celui qui a échappé aux « bobos » et où l’on mange encore du clafoutis maison en buvant un coup de blanc sur un comptoir en formica – se déguste comme un bon vieux haricot de mouton dans une des brasseries enfumées qu’affectionnait tant le commissaire Maigret.

Car ce n’est pas le moindre intérêt du texte que de nous faire vivre la face cachée – résistante pourrait-on dire – de ce joli quartier du Marais que l’auteur se complaît à nous décrire ancré dans son histoire et loin des clichés en vogue. À cela, on le devine, Patrick Weber n’est pas de ceux qui cèdent aux sirènes du conformisme ambiant. « … il avait appris à vivre avec ce travers que certains appellent le progrès… » ; voilà qui devrait hérissé bien des progressistes autoproclamés, on ne saurait s’en plaindre.

Quelques amusantes considérations sur la nature humaine ne manqueront pas non plus de réjouir le lecteur un peu caustique : « Le fameux Fred Lejaune était le prototype du péquenaud qui ne poursuivait d’autre ambition dans l’existence que démontrer au monde la remarquable étendue de ses limites. » Ce n’est pas du Freud, c’est mieux !

Ne boudons donc pas notre plaisir, partageons avec Patrick Weber cet optimisme pas si courant par les temps qui courent en plongeant à cœur joie dans ce Paris qu’on aime et qui contre toute attente s’accroche avec succès à la vraie vie.

L’âme de Paris n’est pas morte et c’est un Belge qui nous le clame !

 

Montociel

 

* Éditions du Masque 311 pages     6,50€  . Prix du roman d’aventures 2011

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