Destins à pile ou face
Robert Brasillach nous invite à une nouvelle promenade dans Paris en compagnie du Marchand d’Oiseaux, qui nous entraîne cette fois à la découverte du parc Montsouris et de ses alentours, avec ses lieux pittoresques et ses personnages haut en couleur : étudiants, commerçants ou gamins livrés au destin. Et aussi ce bien mystérieux marchand d’oiseaux, « dépositaire » et « représentant de Dieu sur la terre », incarnation fantasmagorique de ce même destin, parfois si brutal et cruel, toujours si fragile… tentant d’« entraîner des enfants perdus dans un sillage lumineux, les arrêter au bord de quelque ombre ». Les ombres de la société des temps modernes, à mille lieux de la communauté chrétienne du Moyen Age.
L’histoire est celle d’une commerçante à l’attitude rustique, madame Lepetitcorps, veuve et sans enfant, qui recueille deux jeunes frères, des vagabonds, Serge et Michel, chapardeurs et bientôt davantage…
Outre la restitution vivante du Paris du début des années 30, ces scènes de la vie parisienne livrent toute une galerie de portraits soigneusement brossée et d’une extraordinaire richesse psychologique. On peut en juger à travers cet extrait : « les visages monstrueux de la foule aux mille rondeurs agitaient leurs paupières armées de cils, comme les amibes et les infusoires, palpitaient de leurs narines, de leurs pores souillés, animés d’une vie végétale plus obscure que celles des animaux imprécis que les savants recueillent dans les mers ».
Les thèmes habituels de Brasillach sont abordés, la jeunesse et sa fugacité, l’amitié, la « difficulté des sentiments », l’amour : « la présence et l’acceptation de l’amour sont des voluptés assez merveilleuses et des charités assez hautes pour qu’on ne cherche pas à réclamer mieux ». Mais, dans Le Marchand, l’écrivain va plus loin et s’efforce de mettre en relief l’innocence et la culpabilité, la charité et la justice et surtout la grâce et la nature ingrate.
On trouve également plusieurs touches d’humour savoureuses, à réserver tout particulièrement aux contempteurs de Brasillach : « puisqu’une coalition satanique dirigée par des étudiants de la Cité – encore de futurs francs-maçons sans doute, d’ignobles partisans du Front populaire – avaient réussi à détourner le commissaire… ». Mais ces esprits-là ne font pas l’humour, préférant patauger dans la haine. Dommage pour eux.
Arnaud Robert.
Nouveauté-Pardès: Brasillach LE MARCHAND d’OISEAUX
16, 00 euros –
ISBN 978-2-86714-510-0