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Lire: DE L’UNE à L’AUTRE

Du son au sens

 Existe-t-il une définition à la poésie ? Assurément, non. Car ce genre littéraire est tour à tour, voire tout à la fois, insaisissable, évanescent, aérien, voluptueux ou bien mystérieux… Nombre de personnes sont rétives à cette subtile forme d’expression, souvent parce qu’elles cherchent une explication logique et cohérente au texte, sans percevoir la dimension esthétique s’adressant à l’âme. C’est Nerval qui disait que ses sonnets « perdraient de leur charme à être expliqués »…

Une bonne poésie, pure et enlevée, se distingue avant tout par la musicalité de la langue, un art bien compris d’un virtuose des lettres françaises, Céline. Le poète doit servir les mots, par une alchimie savamment dosée de rythme et de sonorités, d’images, de rimes…

L’ouvrage « De l’une à l’autre » est joué à huit mains par quatre femmes, Cathy Lamoulière, Florence Olivreau, Bernadette Tüscher et Luce Van Torre.

Les textes de Cathy Lamoulière suivent la piste… des Indiens du Lakota et l’idée de croiser ses mots à ceux de la langue sacrée des chamans est des plus insolites et audacieuses. Petit extrait, bien meilleur que tout commentaire : « Dans des veines de verdures ouvertes aux ciels cléments, des étirements de sèves ont rajeuni le temps, des poutres de soleil, éparses de lumière ont inventé des chants, des portées de sonore ont vibré aux étoiles, et la mère attendrie, pleinement reçut le vent »…

Florence Olivreau propose quant à elle des instantanés de vie, des mots pris sur le vif, directs et immédiats. Un court passage de la poésie « L’étrange bruit du silence » : « Il y a le silence qui rebondit, fait des silences qui se croisent, se répondent et nous lient les uns aux autres à l’infini »… Des clichés plein de reliefs sonores !

L’univers de Bernadette Tüscher est tout entier composé par le végétal et le minéral, règne favori des alchimistes ! Elle évoque, dans une joyeuse sarabande de mouvements, de lumières d’odeurs et de bruits, les paysages, les saisons, les éléments… les sentiments. La langue est belle et agréable, subtile, ciselée et chargée d’émotion : « Demain tu me diras / Le murmure des feuilles / Le clapotis de l’eau glacée / La brise dans les cheveux fous / Le tumulte des cascades / Les chemins en liesse / A tant aimer / Le crépuscule est là qui m’attend, serein, / Sûr de lui-même » (poème « Demain » – chapitre « Souvenirs »).

Luce Van Torre offre sa poésie sous le prisme séduisant de l’écriture vécue comme une aventure. Et quelle aventure ! Sa promenade littéraire est ainsi balisée par les thèmes de la nature, de la création, de l’absence, de la violence, de la vie. Le soupir et le silence sont également souvent évoqués dans une œuvre profonde et parfois empreinte de gravité : « Sur les berges souillées / Se dénouent les algues, / Offrant aux mouettes assassinées / Dlongs linceuls noirs. / Et s’immobilise la pluie, / Se suspend le vent, / S’éteint le soleil. ».

« De l’une à l’autre » constitue un bien agréable moment de lecture, où l’esprit s’évade et le cœur vagabonde. La poésie est une pensée dans une image, selon Goethe. Cet ouvrage de quatre femmes en connivence vient en faire l’admirable démonstration.

Arnaud Robert.

    

Les auteures: Cathy Lamoulière. Florence Olivreau.

Bernadette Tüscher. Luce Van Torre-Rodriguez.

 

Collection : Écritures de Femmes

 

Résumé :  Quatre auteures pour cheminer, de l’une à l’autre, d’une image, d’une émotion, d’une parole à l’autre.

Textes libres, poésies, photos et dessins.

 

14,5 x 21 cm. 240 pages. 2013.

ISBN : 979-10-90272-09-5

Prix: 15€

 Site : http://www.editions-les-autanes.com

 

image à la une //crédit photo La Mariée en colère

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