Plus sérieusement, ce premier tour de l’élection présidentielle aura au moins présenté la saveur de l’inédit. Un Président entré dans l’Histoire en en sortant ; contrairement à ses prédécesseurs, il n’a pas brigué de second mandat. Pas de candidats communiste ni écologiste en lice ; une première dans l’histoire de la Cinquième. Et deux candidats sortis du chapeau des primaires que les deux grands partis donnés pour être de « gouvernement » ont cru opportun d’instaurer, pour ensuite se vautrer d’importance.
Et, en piste, deux candidats hors normes. L’un issu d’un tout nouveau parti, même si avatar à peine dissimulé du Parti socialiste ; l’autre présidant un mouvement n’ayant plus guère de gages à donner en matière de politique alternative.
Du coup, c’est l’UMPS qui se trouve, au mieux condamnée à une recomposition générale, au pis à l’explosion pure et simple.
À gauche, c’est évidemment la consternation.
À droite, c’est pire, il va de soi. Fillon appelle à faire barrage au Front national ; il faudra expliquer tout cela aux lecteurs de Valeurs actuelles et aux militants de la Manif pour tous. Remarquez, pour la droite bourgeoise et conservatrice, se faire en permanence gruger dans les urnes est leur ordinaire ; à croire qu’ils aiment ça, les bougres. D’ailleurs, un journal tel que Le Figaro ne devrait pas forcément se faire trop violence pour soutenir le mari de Brigitte Trogneux.
À propos de ce dernier, donné pour vainqueur évident dans quinze jours, l’affaire est-elle véritablement pliée d’avance ? Il lui faudra faire cohabiter les admirateurs de Renaud et de Line Renaud, de Robert Hue et d’Alain Madelin : Goulag et Wall Street, même combat ! En marche ! Vers quoi, au fait ? Ce mouvement a été pensé comme une start-up ; voir le discours d’Emmanuel Macron de ce dimanche, qui fleurait bon les arguments marketing de ces hipsters sous-payés pour faire du contenu sur Internet, histoire de faire le buzz et de vendre des baignoires à porte. Les start-up ? Jeunes pousses surcotées en Bourse, mais ne valant souvent, au bout du compte, dans la vraie vie, que peau de balle et balai de crin.
Au moins les enjeux sont-ils aujourd’hui clarifiés. Ici, deux visions de la France s’affrontent. D’un côté, le peuple ; de l’autre, une caste en perdition, que viennent aujourd’hui rejoindre les demi-soldes de la politique – Christian Estrosi, pour ne citer que le plus emblématique. « La nuit des morts-vivants et autres zombies conservés dans le formol », rappelait Gilbert Collard.
Le discours de Marine Le Pen était, lui, mieux que bien : entendre la voix d’un chef d’État en cette soirée à l’occasion de laquelle le spectateur ne pouvait qu’être médusé à la vue de ce radeau macronien pris d’assaut par ces hordes de naufragés de la politique, ce n’était effectivement pas du luxe. Pas de doute, ce joli mois de mai devrait être chaud.
Nicolas Gauthier //Journaliste, écrivain//Boulevard Voltaire