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Musée de l’Armée. Hôtel des Invalides. Exposition Indochine. Des territoires et des hommes, 1856 – 1956

Si la période annoncée, 1856 – 1956, permet d’explorer « 100 ans de présence militaire française en Indochine », l’exposition dans son tout rappelle les premières interventions de la France dans cette région du monde sous le règne de Louis XIV et débute réellement avec l’action de l’évêque d’Adran, Monseigneur Pigneau de Béhaine qui, à la fin du XVIIIe siècle, permit au roi Nguyen-Anh de reconquérir son trône de Cochinchine.

Devenu, après l’annexion du royaume du Tonkin, empereur d’Annam, Nguyen-Anh prit alors le nom de Gia-Long et s’entoura de conseillers français, des porteurs de sabre acquis à sa cause dans le sillage de l’évêque d’Adran, qu’il promut mandarins. L’exposition présente ainsi les portraits en habits annamites de ces conseillers très spéciaux à la cour de Hué, qui seront de fait les premiers artisans de cette présence militaire en Indochine.

S’ensuit une kyrielle de documents rares, d’objets précieux et symboliques, d’armes, d’uniformes, de pavillons et de tableaux remémorant les grandes heures de la Conquête. S’enchaînent les affiches commerciales et politiques de l’Indochine, l’évocation littéraire, en photos et en films inédits d’actualités ou de particuliers de l’œuvre coloniale de la France, des oppositions et des opérations policières et militaires qu’elle suscite, et ce jusqu’à la signature des accords de Genève et le départ des troupes après le désastre de Diên Biên Phu. La grande saga de la France en Indochine, qui allait lui offrir la « perle de son empire », est ici remarquablement et fidèlement restituée jusqu’à son terme.

Seul bémol peut-être, le passage trop rapide sur le gouvernorat de l’amiral Decoux. On y exonère un peu vite le gouverneur précédent, le général Catroux, de sa responsabilité dans l’installation des Japonais dans la colonie, et l’on occulte concomitamment le rôle de Decoux pour désamorcer autant que faire se pouvait la nocivité de cette présence imposée en qualifiant hâtivement sa politique de « collaboration ». De même, n’est-il pas fait mention du conflit franco-thaï qui vit pourtant un des plus beaux faits d’armes de notre armée dans les circonstances difficiles où elle se trouvait alors dans ces territoires lointains : la bataille de Koh Chang* du 17 janvier 1941, seule victoire navale flotte contre flotte de la France au cours des deux guerres mondiales. Si l’exposition n’omet en rien les exploits de l’amiral Courbet dans les hostilités qui l’opposèrent aux Chinois dans les années 1880, c’est ici faire bien peu de cas de la vaillance de nos marins d’Indochine dans ce conflit oublié, dont certains sont aujourd’hui encore bien vivants.
Mais cette concession à l’imagerie officielle de l’histoire de nos armes était sans doute inévitable dans une manifestation placée sous le patronage du Ministre de la Défense et elle n’est, somme toute, que peu de chose au regard du remarquable travail accompli par ses organisateurs. Ne boudons alors pas notre plaisir. Plongeons sans retenue dans cette geste impériale ressuscitée et imaginons-nous le temps de cette superbe exposition, entre chasses au Tonkin et promenades en pousse-pousse boulevard Charner, évoluer comme avant au sein de cette Indochine mythique.
Une belle initiative, donc, d’autant qu’elle s’entoure tout en son long de conférences, projections et concerts proposés en partenariat qui en renforcent encore la densité.

Du 16 octobre 2013 au 26 janvier 2014, au Musée de l’Armée.

Hôtel des Invalides.

Très belle exposition, à ne surtout pas manquer. Site de l’exposition.

 

merci à -Eric minè

son – blog,

Image à la une

entretien entre le général leclerc et le président de la république du viêtnam ho-chi-minh

Hanoï, 18 mars 1946, photographe : Claude Le Ray
© ECPAD

bataille de Koh Chang*voir aussi notre article en date  du 18/01/2013

Tarifs

  • Billet « exposition temporaire » : tarif unique 8,5 €
  • Billet couplé Musée et Exposition : tarif unique 12 €

Billets :

  • Achetez vos billets en ligne (vers la billetterie en ligne du musée, nouvelle fenêtre)
  • Sur place au musée, deux billetteries sont à votre disposition : côté entrée esplanade des Invalides et côté entrée place Vauban

Conditions de gratuité
Moins de 18 ans, les demandeurs d’emploi et les bénéficiaires des minima sociaux (justificatif de moins de 6 mois), les visiteurs handicapés (un accompagnateur gratuit), les journalistes, les membres de l’ICOM et l’ICOMOS, les personnels civils du ministère de la Défense, les militaires français, les militaires étrangers (en uniforme)
Plan d’accès:

4 Commentaires

  • Bonjour,
    Ayant travaillé sur l’exposition « Indochine. Des territoires et des hommes », je me permets juste d’apporter un correctif à votre article qui déplore l’absence de mention sur la guerre franco-thaï en 1941. En effet, cet épisode est bien mentionné dans un cartel (500 signes) concernant un fanion de DCA du 5e REI qui a combattu à Phum Préav le 16 janvier 1941. Certes de manière très succincte, mais la victoire de Koh Chang est également mentionnée. Les cartels d’objets sont là pour donner quelques informations plus précises que les grands textes sur les cimaises.
    Cordialement,
    Jordan Gaspin

    • Cher Monsieur Gaspin,
      Merci de l’attention que vous avez bien voulu accorder à mon article, qui est la reprise par « Infos 75 » d’une première publication sur mon blog.
      J’avoue très humblement ne pas avoir remarqué le cartel évoquant la guerre franco-thaïe que vous me signalez et je retournerai très prochainement au Musée afin d’en lire son contenu. Selon sa teneur, j’apporterai bien volontiers la rectification nécessaire à mon propos.
      En ce qui concerne la bataille de Koh Chang, je pense que vous faites allusion à un dessin que m’indiquait aussi récemment madame Robic-Diaz. C’est un peu court, dans mon esprit, au regard de l’événement.
      En fait, sur un plan plus général, il m’a semblé que la petite salle consacrée à la période de la Seconde guerre mondiale dénotait par rapport à l’ensemble de l’exposition, que j’ai voulu saluer, par ailleurs, pour la grande richesse des objets et des documents exposés, et dont j’ai cru comprendre que vous étiez l’un des artisans principaux.
      L’enchaînement des événements, quant à lui, est d’une grande cohérence et d’une parfaite objectivité, je l’ai rappelé, sauf, justement, pour la période en question.
      Je l’ai dit aussi, je n’en impute en rien la responsabilité aux organisateurs qui ont réalisé là un travail magnifique. Disons-le comme cela, ce serait un peu « l’air du temps » qui serait en cause, et son « politiquement correct ». Mais je modère la portée de ce que je nomme un « bémol » en précisant que cette concession était sans doute inévitable.
      Toutefois cette absence, ou cette simplification, des années du gouvernorat de l’amiral Decoux a pour le public, me semble-t-il, la conséquence fâcheuse d’occulter l’une des raisons essentielles du déclenchement de la guerre d’Indochine, à savoir les quelques semaines qui, de la capitulation du Japon à la libération effective des prisonniers français dans le sud du pays, ont permis aux Japonais d’armer le Viet-Minh et ont altérer profondément auprès des Indochinois l’image qu’ils pouvaient avoir conservée de la France. C’est dommage. Mais je comprends parfaitement qu’évoquer une possible responsabilité du général de Gaulle, comme de rappeler les vraies raisons du limogeage du général Catroux, était mission impossible au Musée de l’Armée.
      Une dernière remarque, peut-être – je n’y fais aucune allusion dans mon article –, il ne m’a pas paru que dans les opposants à la politique coloniale, les nationalistes partisans d’une association maintenue avec la France, je pense surtout à Pham-Quynh, aient été rappelés. Comme, non plus, que l’amiral Decoux fut le premier homme d’État français à parler publiquement du « Vietnam ». Mais, même dans une exposition aussi achevée que celle-ci, on ne saurait tout rappeler.
      L’essentiel, pour moi, n’en reste pas moins sa belle tenue, ainsi que l’immense travail qu’a dû nécessiter la mise à disposition du public de documents rares et d’objets précieux qui pour moi ont été une découverte inoubliable. Je profite donc de notre échange, cher Monsieur Gaspin, pour encore une fois vous en féliciter.
      Veuillez recevoir, cher Monsieur, l’assurance de mes sentiments les plus cordialement reconnaissants.
      Éric Miné
      ;

      • Monsieur Miné,
        Je vous remercie infiniment pour votre réponse très complète ainsi que pour vos compliments pour notre exposition.
        Contrairement à ce que l’on pourrait penser, le musée de l’Armée n’est pas soumis à une « certaine censure » concernant certains sujets comme le rôle de l’amiral Decoux en Indochine durant la Seconde Guerre mondiale.
        Il faut juste rester didacte auprès du plus large public, sans bien entendu tomber dans la caricature, et nos espaces d’exposition étant limités, nous ne pouvons pas développer tous les sujets.
        Nous avons eu également de remarques sur la fin du Groupement mobile 100 (GM 100) qui a combattu après la chute de Dien Bien Phu dont nous ne parlons pas tout comme le rôle du « Pasteur », principal transport de troupes vers l’Indochine.
        Pour finir, tout le Département contemporain vous remercie une nouvelle fois pour vos félicitations pour notre très belle exposition.
        Jordan Gaspin

  • Bonjour.
    J’ai récupéré dans une malle des vêtements militaires ayant appartenu à mon beau père décédé.Je ne peux me résoudre à les faire recycler , je pensais que cela pourrait servir pour des reconstitutions !? pour le souvenir…Merci de me contacter ou me laisser un message!
    Je ne manquerait pas de visiter l’exposition .

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