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Johnny, tu sais, on te trouve géniaux !

Soixante-dix balais, la voix encore au top niveau, Johnny enflamme Bercy en direct sur TF1 et, fidèle à lui-même, lance à son public enamouré : « Vous êtes génials ! » Il est comme ça, Johnny. Quand il aime, il compte pas. Un ou plusieurs, de toute façon, de la

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scène on ne voit rien. Peut-être n’y a-t-il qu’un seul spectateur en costume cravate ? Alors Johnny lance à tout hasard : « Vous êtes génial ! » Il se reconnaîtra.

Johnny est un abonné de la bourde, grammaticale ou autre. Il sévit sur tous les terrains. Un multicarte de l’incongruité verbale. Sur ce registre, notre rocker a fait des débuts prometteurs avec la prouesse phonétique : toute la musiQUE QUE j’aime. Le rocker a ensuite enchaîné avec la phrase culte du Paris – Dakar : « Et dire que si on était parti une heure plus tôt, on serait arrivé une heure plus tôt » ; puis il y eut « Zazi » au lieu de « Zizou » pour parler de Zidane et bien d’autres incartades que le nombre de signes réservé à cet article ne permet pas d’exposer.

Non content de son parcours hors du commun dans la chanson, la star réussit donc la performance d’y ajouter une carrière parallèle dans le patinage artistique verbal. Un piment linguistique sans lequel l’idole ne serait pas ce qu’elle est. Avec Johnny, la bévue n’est jamais loin. À quel moment va-t-elle surgir ? Va-t-il nous donner du « malgré que », du « si j’aurais su » ? Un jour, Johnny mourra d’un « infractus » ou de la maladie « d’El Zemmer ». C’est comme ça. On lui aura trouvé un mal qui lui permet un dernier exercice de style, un dernier bon mot bien de travers pour finir en beauté…

Johnny se fout pas mal de la syntaxe, des accords et des pluriels. Il laisse ça aux besogneux. C’est sa force. Le triomphe de l’instinct. Et on ne cherche pas maître Capelo dans l’orchestre : de toute façon, il est mort. Peut-être après avoir entendu une interview de Johnny ?

Johnny ne cherche pas, il trouve. Personne ne sait comment, ni pourquoi. La chanson qu’il lui faut, le groupe qui ira bien, la scène, les lumières, tout ça, il n’y comprend rien mais sent tout. Talent spontané, bête de ceci ou de cela, tout a été dit alors que lui serait bien en peine de définir quoi que ce soit. Johnny est un des derniers artistes à ne rien intellectualiser. Et c’est très reposant. Pas de déclaration alambiquée ou d’état d’âme tortueux. Il avance, chante et ne nous bassine pas avec des réflexions oiseuses sur la faim dans le monde ou la guerre au Mali.

Seul son côté suiveur ternit le tableau. Hippie, Mad Max, rocker gominé, cheveux longs, cheveux courts, il a tout suivi. Chantre de toutes les tendances, à l’affût des compositeurs en vogue, il a tout écumé pour en arriver là et, à part quelques esprits chagrins dans mon genre, personne ne s’en plaint.

Pour toutes ces raisons, Johnny, tu vois, on te trouve vraiment géniaux.

merci à Leroy
Auteur pour la télévision.
source -Boulevard Voltaire

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