Je me souviens.
Je me souviens d’il y a dix ans, dans les bars parisiens. Les jolies filles étaient un peu moins communicatives. Prétentieuses toujours, il y a des choses qui ne changeront jamais. Mais, quoiqu’il en soit, elles vous parlaient bien moins facilement qu’aujourd’hui.
Aujourd’hui, si vous êtes attablé à côté de quelques jolies filles, vous finirez par échanger à un moment. C’est forcé. La densité de population dans les bars pousse à ça. C’est d’ailleurs le deuxième facteur de choix de bar. On paye avant tout cette proximité obligée qui, naturellement, permettra d’engager la discussion. Quant aux filles, si j’y comprends quelque chose, je présume que pour elles il s’agit de maximiser la chance de se faire draguer, voire de se faire payer un verre dans les bars.
Nous sommes follement enthousiastes.
Les jolies filles se mettent à nous parler.
Elles ne sont pourtant pas moins chieuses ou plus intéressantes qu’hier.
Mais entre temps, on a connu dix ans de Friends et de How I Met Your Mother.
La jolie fille de bar parisien a désormais l’obligation sociale de montrer un peu d’esprit. Enfin. D’afficher une répartie de bon aloi.
Pitié…
Foutue modernité de merde.
Avant, si ça ne se passait pas très bien, elle se contentait de vous toiser de manière méprisante, sans même tourner la tête parfois. La jolie fille n’ouvrait pas la bouche et tu la respectais. Et elle aussi, quelque part, te respectait.
Désormais, elle se sent obligée de tenter de se foutre de ta gueule. Et ça, c’est insupportable. Déjà, la plupart des mecs n’osent alors pas leur répondre sur le même ton et les mettre minables. Certains parce qu’ils ne le peuvent pas, d’autres parce qu’ils ne sont pas parisiens et n’y sont pas habitués, d’autres par un optimisme sans faille et cet espoir fou d’arriver quand même à les baiser-sait-on-jamais.
Une sorte de Ridicule pour et par la meute de BAC+5 semi-mongoliens et paupérisés dans les bars à sept euros le demi.
Tragique.
La drague de bar parisien est devenue encore plus moche qu’avant parce que toutes les filles, jolies ou pas d’ailleurs, ont dix ans de séries américaines derrière elles.
Avant, il y avait un vrai truc qui empêchait. On était pas assez beau pour la jolie fille, ou on avait pas assez d’argent, ou un appartement vraiment trop petit et merdique. On savait quoi faire pour y remédier et les choses semblaient ancrées dans la réalité. C’était un temps où il subsistait encore quelques valeurs. Maintenant, si tu joues le jeu facile d’un ersatz de Gaspard Proust et autres dandy de supermarché, tu peux presque baiser n’importe quelle jolie fille parisienne et la ramener sur un scooter pourri dans ta chambre de bonne du IVème arrondissement.
Vroum vroum !
La dégénérescence n’est plus limitée à une élite dégénérée.