Marisol Touraine, ministre de la Santé, entend interdire la cigarette électronique. Ses utilisateurs ? Des « vapoteurs » ! Dans le genre néologisme inepte, il fallait vraiment se gratter l’intérieur du nez jusqu’à l’os pour trouver plus con. On imagine bien Jean Gabin et Michèle Morgan, Humphrey Bogart et Lauren Bacall, regards englués l’un dans l’autre, l’une susurrant à l’oreille de l’un, après avoir allumé d’un briquet virtuel la cigarette 2.0 : « Après l’amour, tu vapotes ?
Comme toujours, il paraît que c’est pour notre bien. Mais qu’est-ce que notre « bien » leur a fait pour que certains lui veuillent tant de mal ? Bref, pourquoi tant de haine ?
En attendant, une première salle de shoot devrait être bientôt ouverte dans Paris. À Amsterdam, les fumeurs de tabac se grillent une cousue sur le trottoir, alors que les amateurs de cannabis se la roulent tranquille au chaud. Pourtant, dans un joint fabriqué dans les règles de l’art, il y a autant d’herbe à Nicot que de ganja à Bob Marley… À partir de quel dosage le RAID et le GIGN locaux devront-ils intervenir ?
Pauvre Martin, pauvre misère, chantait Georges Brassens. Pauvre fumeur, répondrons-nous en écho… Pauvres cafés de campagne, fermant jour après jour pour laisser place, au mieux à rien, au pire à des Starbucks… Car en France, le bistro demeurait, jusqu’il n’y a pas si longtemps, une sorte d’institution. On y refaisait le monde. Toutes les catégories sociales s’y brassaient. Cela faisait même un assez bon vivier d’opposition, vis-à-vis de cette pensée médiatique allant de TF1 à Canal Plus tout en passant par France Inter… Aujourd’hui, entre les contrôles de la maréchaussée interdisant d’y boire plus que deux godets et la prohibition des fumeurs, le désert.
Alors, la cibiche à neuneu, le bidule électronique qui pue le liquide à vaisselle, a pu faire un temps illusion. Mais c’est déjà manifestement trop pour les Torquemada des temps modernes.
Au fait, puisque nous en sommes dans l’hygiénisme de combat, combien de tonnes de pesticides répandus sur nos récoltes, combien de saloperies transgéniques, de désherbants causant bien plus de morts prématurées que le tabac du soldat ? Celui des tranchées de Verdun, ou fumé à pleins poumons par l’homme du 18 juin 1940 ? Fumer serait-il en passe de devenir acte de résistance ? Oui, peut-être. Cela ferait-il mourir avant terme ? Ce n’est pas à exclure. Mais devant le monde qu’on nous prépare, le plus tôt sera le mieux.
Ces choses dites, et excipant de la bonne éducation que m’ont donnée mes parents, je tenais à préciser qu’en tant que fumeur, ceux qui ne fument pas ne m’ont jamais dérangé. Qu’ils me rendent au moins cette politesse ; ce serait bien le moins.
Nicolas Gauthier