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Et si l’on rétablissait la peine de mort pour Dieudonné ?

Drôle d’époque que la nôtre, fille bâtarde de celle où il était « interdit d’interdire », mais dans laquelle les libertés se réduisent comme peau de chagrin. Plus le droit de boire. Plus le droit de fumer. Plus le droit de rire, désormais. En effet, Dieudonné M’Bala M’Bala ne fait pas rire tout le monde. Guy Bedos et Jean-Marie Bigard non plus. Et alors ?

Il paraît qu’il serait antisémite. Et alors ? Guère plus que le défunt Pierre Desproges, dont certains textes ne seraient aujourd’hui pas loin de déclencher un holocauste nucléaire à la LICRA ou au CRIF. À peine moins qu’un Louis de Funès qui, après avoir tourné le Rabbi Jacob de Gérard Oury, admit que ce film avait fait tomber chez lui certains clichés antisémites, mais que tout de même, « on ne lui ôterait pas de l’idée que… » À mort, Fufu !

Dans la foulée, à mort, Patrick Timsit ! Pourtant un peu juif, un peu pied-noir qui, dans son spectacle, Le spectacle de l’homme seul debout, balance du plus que lourd sur ses coreligionnaires et admet, à la télévision et à heure de grande écoute, « que Hitler avait du génie… » Tout comme Farid Abdelkrim, roi du stand-up banlieusard, mais autrement plus couillu qu’un Jamel Debbouze, qui se moque des musulmans des cités, de leurs vilains défauts et de leurs mauvais travers. Faudra-t-il donc lui interdire, lui aussi, de se produire, juste histoire de gagner sa vie et de nourrir sa famille ?

Toujours la même question : peut-on rire de tout ? Oui, répondent certains, mais pas avec n’importe qui. Certes. Mais demeure la question majeure : qui dresse la liste des rigolos fréquentables et celle, aussi noire que le Dieudo en question, de ceux qui ne le seraient pas ? Est-ce la fameuse « liste Cohen », du nom de Patrick Cohen, animateur de la matinale de France Inter, et justement dénoncée par Daniel Schneidermann dans Libération ? Liste qui disait qui il fallait ou non inviter, liste dont étaient évidemment exclus Tariq Ramadan, Alain Soral, Marc-Édouard Nabe et… Dieudonné.

Oui, drôle d’époque que la nôtre. Qui se veut libertaire quand ça l’arrange et liberticide quand ça la dérange. Où l’on aime l’art qui dérange – Femen, homards gonflables de Jeff Koons, happenings approximatifs où l’on fait pipi sur le Christ et popo dans des gamelles et des bidons – mais qui, dès lors que ça commence à déranger pour de bon, dérange justice et forces de l’ordre. Les gendarmes, meilleurs remparts de l’anarchie et de la chienlit, si l’on m’avait dit ça dans mes jeunes années, j’aurais ri. La cinquantaine passée, ça donnerait plutôt envie de pleurer.

Oui, une fois encore, Dieudonné dérange et cela devrait réjouir les sectateurs de cet art qui « dérange ». Même pas : au lieu de ça, ils se font gloire de leur profession de nouveaux censeurs. Ils raillaient jadis la tyrannie du trône et de l’autel, pour désormais se conduire comme les pires des calotins, néo-cléricaux d’un genre nouveau. Mince, l’ordre moral est de retour. Et ce n’est pas la faute de Christine Boutin. Ce sont les enfants de Charlie Hebdo qui brandissent la matraque, à l’abri de leurs boucliers médiatiques. Quel retournement ! Quelle ironie ! Quelle farce ! Quelle imposture ! Quel monde que celui que nous allons léguer à nos enfants…

Nicolas
Gauthier
Journaliste, écrivain.
Nicolas Gauthier est auteur avec Philippe Randa des Acteurs de la comédie politique. 29 € À commander en ligne sur francephi.com.
source -Boulevard Voltaire
Image à la une -Film V pour vendetta

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