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18% de Bretons favorables à l’indépendance !

Le numéro du magazine Bretons de février 2013 mérite d’être conservé. La maison semble avoir les moyens puisqu’elle vient de s’offrir un sondage IFOP. Il porte sur un échantillon représentatif de 802 personnes, réalisé par la méthode des quotas. Les cinq questions ont été posées du 10 au 14 décembre sur l’ensemble de la région, incluant bien entendu la Loire-Atlantique. Avec des résultats variés et parfois inattendus. 48% des habitants de la Bretagne se sentent d’abord Français, 58% souhaitent que l’on introduise l’enseignement du breton à l’école, mais seulement 31% connaissent leur histoire.

Ci-dessus, la première mouture de la Une du magazine Bretons.

 

Presse : les payeurs ont toujours raison

A la question la plus urgente qui soit, à savoir la réunification, 44% des personnes interrogées répondent oui, 36% non et 20% déclarent ne pas savoir. On constate que c’est en Loire-Atlantique que les gens sont le plus favorables à la réunification (56%), suivis par les Finistériens (46%), puis par les Morbihannais et les Costarmoricains (44%). Mais, en Ille-et-Vilaine, les choses coincent : seulement 27% d’avis favorables. Sans doute le vieil antagonisme provoqué par la localisation de la capitale est-il pour beaucoup dans ce mauvais résultat.

Face à Nantes, Rennes ne fait pas le poids, tant sur le plan démographique (200.000 habitants contre 260.000), économique, des équipements que sur celui de l’image de « métropole européenne ». Les élites rennaises le savent et redoutent une réunification qui ferait immanquablement perdre à leur ville son leadership. Tant que la Bretagne reste à quatre départements, Rennes ne peut se voir contesté son rôle de capitale par Brest, Lorient ou Saint-Brieuc. Mais cette suprématie disparaît tout de suite si l’on introduit Nantes dans le jeu breton. Cette méfiance à l’égard d’une hégémonie nantaise semble donc également partagée par le « peuple » d’Ille-et-Vilaine.

Toute tentative de réaliser la réunification butera obligatoirement sur la question de la capitale. Avec un débat axé sur l’affaire de la capitale – une et indivisible – c’est l’échec assuré. Seule la prochaine loi concernant l’ « Acte III de la décentralisation » pourrait desserrer l’étau si la possibilité était offerte de dissocier le délibératif (les assemblées régionales) et l’exécutif (Le président de la région). Avec, dans ce cas, par exemple, le conseil régional à Rennes et le président de région – avec son mini-gouvernement – à Nantes. Ou vice versa. Notons que cette séparation existe déjà en Corse (Assemblée de Corse d’un côté et exécutif territorial de l’autre).

Certes Marylise Lebranchu, ministre de la Réforme de l’Etat, de la Décentralisation et de la Fonction publique, acquise au principe de la réunification, pourrait ramer dans cette direction, mais comptons sur la vigilance de Jean-Marc Ayrault pour bloquer toute une évolution qui aurait pour conséquence d’empêcher Nantes de devenir la capitale de l’Ouest – ce que souhaitent les milieux d’affaires. Or Jean-Marc Ayrault n’a rien à refuser à ces derniers. Donc M. Ayrault marquera à la culotte Mme Lebranchu lorsqu’elle avancera dans la rédaction du projet de loi concernant l’ « Acte III de la décentralisation ».

La cinquième question posée par Bretons pouvait surprendre, voire relever de la provocation : « Seriez-vous tout-à-fait favorable, assez favorable, assez opposé ou tout à fait opposé à ce que la Bretagne devienne indépendante ? » Réponse : tout à fait favorable 5%,assez favorable 13%, assez opposé 33%, tout à fait opposé 49%. On apprend donc que 18% des Bretons sont favorables à l’indépendance ! Les explications accompagnant cette question étonnent également : 94% des sympathisants de l’UMP sont contre l’idée d’indépendance de la Bretagne, tandis que 47% des électeurs du Front national y sont favorables.

La recherche du sensationnel et du commercial voulait que Bretons accrochât à la une les « 18% de Bretons favorables à l’indépendance ». Ce que la rédaction fit (image en Une de notre article).

…et la version finalement mise en venteLa version finalement mise en vente

Mais l’indépendance de la presse a des limites vite atteintes : Ouest-France est à la fois actionnaire et distributeur du magazine. Fort logiquement, la direction de Chantepie n’apprécia pas la plaisanterie. Il fallut donc troquer les « 18% » d’indépendantistes contre « 69% des Bretons ignorent leur histoire ». Une une plus sage. Autrefois, Jean Bothorel, rédacteur en chef de Bretagne magazine (première manière), connut les mêmes ennuis avec son propriétaire, le groupe Hachette, a cause des articles enflammés – volontiers pro-FLB – d’un certain Xavier Grall. Hachette se fâcha et ferma la boutique. En haut lieu, un simple coup de téléphone donné au payeur – Hachette – pouvait suffire pour mettre un terme à l’expérience Bothorel qui, de journaliste, était devenu militant.

Il serait dommage que pareil accident cardio-vasculaire arrivât à l’équipe de Didier Le Corre. On peut fabriquer un magazine intéressant tout en sachant qu’il y a une ligne rouge à ne pas franchir. Celle fixée par celui qui assure les fins de mois. Ouest-France par exemple…

Robert Hersant, qui savait de quoi il parlait, rappelait volontiers cette règle élémentaire : « La liberté de la presse s’arrête la où commence le tiroir-caisse ». Il est vrai qu’aujourd’hui, grâce à internet, le système peut être contourné et les sites de réinformation prospérer. Une révolution pour la liberté de la presse, qui ne fait que commencer.

Paul Le Guern

source -Novopressinfo-Bretagne

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