À n’en point douter, la sortie des mémoires de Jean-Paul Belmondo sera l’un des événements littéraires majeurs de ces prochains jours.
Comme « Gégé », « Bébel » a mené une carrière hors normes, ayant attiré sur ses films plus de 130 millions de spectateurs, ce, rien que pour la France, alternant films « auteurisants » – À bout de souffle et Pierrot le fou, avec Jean-Luc Godard – et d’autres destinés à un plus large public ; dont les rênes étaient souvent confiées à ces deux artisans d’exception que demeurent Henri Verneuil et Georges Lautner. Ou de l’art d’être à la fois Léon Morin, prêtre, chez Jean-Pierre Melville, Cerveau, chez Gérard Oury et Homme de Rio, chez Philippe de Broca.
Pourtant, tout avait mal commencé pour lui. Éternel recalé au Conservatoire, Pierre Dux, l’un de ses professeurs, disait de lui : « Avec la tête qu’il a, il ne pourrait jamais prendre une femme dans ses bras, car cela ne serait pas crédible… » Pourtant, Bébel fit battre autant de cœurs féminins – celui d’Ursula Andress, par exemple, près de dix ans durant – qu’il battit de méchants, l’affreux Minos de Peur sur la ville (Henri Verneuil), pour ne citer que l’un des plus emblématiques.
Virevoltant dans ses amours certes, il était néanmoins d’une totale fidélité en amitié avec ses vieux copains de Conservatoire, Jean-Pierre Marielle, Bruno Cremer, Jean Rochefort, Michel Beaune et Pierre Vernier. Et même un écrivain, l’immense Antoine Blondin qui avait salué l’adaptation de son Singe en hiver (Henri Verneuil, toujours), avec lequel il goûta plus que de raison les plaisirs de la nuit et du zinc, plaisirs se finissant généralement en bagarres générales; Blondin pouvait avoir le vin mauvais…
À rebours de nombre de ses confrères, Bébel, s’il avait comme tout un chacun ses avis en politique, n’en fit jamais part en public. Dans un entretien récemment accordé au Point, il se contente donc de cette seule confidence :
Le général de Gaulle est le seul homme politique qui m’ait impressionné.
À propos des récents attentats perpétrés en France ? Cette réponse laconique :
Je suis triste, bien sûr, mais content que les gens restent quand même optimistes. […] Jamais je n’aurais pu imaginer, quand je repense à cette France gaie que j’ai connue, que la situation dégénérerait ainsi.
« Une France gaie », qui sortait pourtant des affres de la guerre, et dont lui, petit-fils d’immigrés italiens, est toujours nostalgique, même lorsque abordant la délicate question du racisme :
Évidemment, il faut accepter ce que l’autre est. Noirs, Blancs, Jaunes, quelle importance, ce sont des Français. Des Français. Je sais ce que c’est, le racisme. À la communale, avec mon frère, combien de fois on s’est fait traiter de Ritals… On se bagarrait, on tapait dans le tas, c’est comme ça que tout a commencé, la boxe : la nécessité de rendre des coups…
Jean-Paul Belmondo ? Tout, sauf un Guignolo.