Une foi en actes : la Cristiada
Qui connait la geste des Cristeros mexicains, ces catholiques persécutés et massacrés en raison de leur foi ? Peu de monde, trop peu de monde, surtout au regard de l’importance de la mobilisation d’une nation entière et de celle de la répression implacable et sanglante des régiments de ligne fédéraux. Mais comment eut-il pu en être autrement, puisque cette épopée cristera a été interdite d’enseignement pendant près de trois générations ?
1911. Des « Yankees », appelés ainsi car ils viennent des territoires désertiques du Nord mexicain, protestants, francs-maçons et marxistes, prennent le pouvoir au Mexique, pays sociologiquement et spirituellement le plus catholique du monde. La Constitution est adoptée en 1917 ; elle est d’essence fondamentalement dictatoriale et marxiste. Tous les corps intermédiaires, dont les syndicats catholiques, sont mis dans l’illégalité. La loi prévoit aussi une cascade d’articles anti-religieux.
La Révolution s’accélère dès 1924 avec l’arrivée au pouvoir de Plutarco Elias Calles qui décide d’appliquer à la lettre la Constitution de 1917. Les congrégations religieuses sont expulsées, les biens de l’Eglise sont inventoriés aux fins de nationalisation, les organisations professionnelles non gouvernementales (c’est-à-dire catholiques) sont interdites, l’enseignement devient laïque pour tout le monde, le port de vêtements ecclésiastiques est prohibé, les prêtres doivent être enregistrés (ils ont obligation de « pointer » au commissariat et d’y signer des engagements de non prosélytisme religieux), un nombre important d’édifices religieux est détruit… A l’été 1926, « tout individu responsable d’une église » se voit « condamné à 50 pesos d’amende et un an de prison si les cloches sonnent »… la même peine est encourue « pour toute personne qui apprend à prier à ses enfants ». Dès lors, le peuple mexicain est au pied du mur, sommé de se défendre ou de périr dans la foi.
Des pétitions sont adressées au Congrès, des occupations d’églises et des manifestations de rue sont organisées. Les pétitions sont niées, les rassemblements sont réprimés au Mauser et à la mitrailleuse lourde par les régiments de ligne fédéraux… Pendant ce temps, l’épiscopat mexicain, qui en rappelle un autre, ne prend pas la mesure de l’événement ; il temporise, prêche la patience et la modération, bref, il se fourvoie. Seuls trois évêques (ceux de Huejulta, Durango et Guadalajara) se montreront dignes vicaires du Christ : ils seront bannis du Mexique ou maintenus en exil. Misère et couardise de l’épiscopat… les Cristeros, abandonnés, montent seuls au combat sous leur seule responsabilité de baptisés.
Aux premières lignes de l’insurrection cristera, on trouve la Ligue Nationale pour la Défense de la Liberté Religieuse (LNDLR), avec 800 000 militants, dont un demi million de femmes et sa branche étudiante, l’Association Catholique de la Jeunesse Mexicaine (ACJM), très militante. Les Brigades féminines Sainte Jeanne d’Arc, surnommées Brigadas bonitas (jolies brigades) par les étudiants cristeros, sont également à mettre à l’honneur de ce combat pour la liberté de croire.
La guerre, qui rappelle immanquablement celle de Vendée, va durer trois ans (1926-1929) et provoquer le massacre de 80 000 à 290 000 personnes, hommes, femmes et enfants, qui seront fusillés, poignardés, égorgés, pendus et préalablement torturés par les « défanatiseurs » de l’armée fédérale de Calles, soutenu par les Etats-Unis, préoccupés, déjà, par les concessions de pétrole et animés par la vigueur du sentiment anticatholique. Cette guerre atroce ne s’achèvera qu’en 1929, avec les « Arreglos », accords en trompe-l’œil à l’initiative des Etats-Unis, conspirés entre deux évêques indignes et le gouvernement, auxquels les Cristeros ne seront pas associés. Un comble !
Malgré ces « accords » et les garanties offertes en échange du licenciement de la Guardia nacional (l’armée des Cristeros), les massacres se poursuivront encore plusieurs années…
Comme l’écrit Hugues Kéraly, journaliste, spécialiste de l’Amérique Latine : « vingt-et-un prêtres et laïcs ayant participé à l’insurrection cristera ont été canonisés le 21 mai 2000 par le pape Jean-Paul II. C’est lui encore, le 22 juin 2004, qui élèvera au rang de martyrs treize autres militants assassinés pendant ou après la Cristiada, béatifiés le 20 novembre 2005 dans la cathédrale de Guadalajara… »
Un magnifique hommage aux Cristeros, martyrs du Christ-Roi, puisé aux meilleures sources par la talentueux Hugues Kéraly.
Viva Cristo Rey !
Arnaud Robert.
224 p.
Ed. l’Homme Nouveau – 2014
Dim. 13.5 x 22 cm.
20€