« L’acte de trahison le plus retentissant de la Ve République ?(…) Sans aucune hésitation, celui du général De Gaulle vis-à-vis des Français d’Algérie, c’est vraiment une trahison de nature politique. Si j’ose dire, c’est une trahison d’État »
Entretien avec Manuel Gomez, auteur de « De Gaulle sa face cachée » (éditions Dualpha)
(Propos recueillis par Fabrice Dutilleul)
Pourquoi avoir écrit un tel livre ?
J’estime que notre jeunesse ne doit pas rester figée dans l’idéologie gaullienne qui fait, dans notre Histoire de France, du Général le « sauveur de la nation ». Très peu de personnes ont entendu l’appel « soi-disant historique » du 18 juin pour les deux raisons suivantes :
1) Qui écoutait Radio Londres à l’époque ? Quelques rares personnes.
2) Les Français avaient bien d’autres préoccupations à l’époque, fuyant l’avance ennemie, que d’écouter Radio Londres. D’ailleurs même le second « appel » remanié et diffusé le 26 juin n’a, lui aussi, été entendu que par très peu de Français. On peut compter sur les doigts d’une main les personnalités qui ont rejoint De Gaulle suite à « ses appels »… C’est pourtant l’idée générale que se fait la très grande majorité des Français métropolitain !
Et c’est justement contre cette idée que je m’élève. Les évènements, les historiens, les médias et surtout Churchill, ont fabriqué De Gaulle. Il leur fallait une personnalité représentative de la France et il était là avec son uniforme et ses deux étoiles alors que les personnalités pressenties s’étaient récusées (Mandel, Reynaud). Il est nécessaire que cette très grande majorité apprenne à connaître la véritable personnalité et les véritables motivations de De Gaulle. Mon livre y contribue.
Ces motivations réelles, qu’elles sont-elles ?
Celles d’un opportuniste qui a su tirer profit de toutes les
occasions que les évènements lui ont offert et su, avec
machiavélisme, les retourner à son unique profit (s’il avait trouvé un moyen de locomotion pour revenir en France dès le 17 juin il n’aurait pas hésité et c’en était fini de son histoire). Celle d’un manipulateur qui a toujours agit par délégation sans jamais participer à l’action. Il propose la direction à suivre selon le but qu’il s’est fixé, mais en méprisant et trahissant successivement tous ceux qui l’ont aidé à l’atteindre.
Existe-t-il encore des zones d’ombre qui n’ont pas été explorées dans ce livre ?
Évidemment, en ce qui concerne De Gaulle, il existera toujours des zones d’ombre, par exemple l’assassinat de l’amiral Darlan, les attentats contre Giraud, Moulin, Leclerc, Salan et bien d’autres. Le cas le plus flagrant est l’attentat contre le général Salan : De Gaulle a fait croire à Michel Debré que la nomination de celui-ci programmait la fin de l’Algérie française et qu’il était souhaitable de « l’écarter ». D’où l’attentat au bazooka où le commandant Rodier a trouvé la mort. Cela explique la décision de Salan de créer l’OAS afin de respecter ses engagements et les ordres qui lui avaient été donnés alors qu’il n’était ni de droite, ni d’extrême droite et encore moins fasciste, comme a voulu le faire croire la gouvernance gaullienne.
Qu’elle est, selon vous, sa plus grande trahison ?
Permettez-moi de laisser répondre à ma place le journaliste Alain Duhamelauquel on a posé la question :
« Quel est l’acte de trahison le plus retentissant de la Ve République ? »
Sa réponse : « Sans aucune hésitation, celui du général De Gaulle vis-à-vis des Français d’Algérie, c’est vraiment une trahison de nature politique. Si j’ose dire, c’est une trahison d’État. »
Son action aurait-elle justifié qu’il comparaisse devant un tribunal international pour « crime contre l’humanité » ?
J’estime que le dossier impliquant la « gouvernance gaullienne » apporte tous les éléments justifiant une comparution pour « crime contre l’humanité ». Surtout en ce qui concerne le sort de dizaines de milliers de harkis et d’Européens d’Algérie, sacrifiés sur ses ordres et ceux de ses ministres après le « soi-disant » cessez le feu du 19 mars 1962. Et il aurait été souhaitable que soient associés à cette « gouvernance gaullienne » (Messmer, Joxe, etc.) tous les responsables militaires au plus haut niveau de grade (Katz, Debrosse, etc.) qui ont ordonné à l’armée française de rester l’arme au pied alors que l’on assassinait allègrement une population française et arabes aussi bien à Alger, le 26 mars 1962 qu’à Oran entre les 27 juin et 5 juillet de la même année.
De Gaulle sa face cachée de Manuel Gomez, éditions Dualpha, collection « Vérités pour l’Histoire », dirigée par Philippe Randa, 254 pages, 27 euros.
Francephi diffusion – Boite 37 – 16 bis rue d’Odessa – 75014 Paris – Tél. 09 52 95 13 34
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Image à la une -Charles de Gaulle à l’Elysée lors d’une conférence de presse le 31 janvier 1964. | Photo Le Parisien/PhotoPQR/MaxPPP