Voici cinq semaines que je suis sortie de la clinique et j’aspirais à reprendre rapidement mes visites d’expositions depuis si longtemps abandonnées. Claude et moi avons choisi un lieu où nous n’aurions pas trop de piétinement à subir, à l’heure d’ouverture.
Je suis fière d’avoir pu faire cette visite au Musée de l’Armée, particulièrement émouvante.
Pour les témoins de la Grande Guerre, montrer la réalité du front et l’expérience des combats a été un enjeu important, que l’exposition met en lumière dans toute sa cruauté. Vu du front offre un panorama diversifié des représentations de la guerre par ceux qui l’ont vécue. Sur tous les fronts, de tous les côtés des tranchées, on découvre des artistes peu souvent cités ou oubliés, ou mieux connus pour leur spécialité particulière (comme le peintre animalier Paul Jouve, très apprécié de Nicolas I. qui fut envoyé sur le front des Blakans.)
J’ai noté que le général qui dirigeait le musée de l’Armée de l’époque ne faisait pas confiance aux nouvelles technologies comme l’image animée ou la photographie. Ainsi furent envoyés en mission des peintres reconnus … cependant, on en vient à penser que les combattants – même des artistes non-professionnels – éprouvaient le besoin absolu de retracer sur papier les images terribles qui s’imprimaient dans leur mémoire, et qui les poursuivaient après les combats.
Une sorte de thérapie, sans doute. Ainsi s’intitule une aquarelle de la tranchée de Riom : Ce qui reste de mes amis … car la violence faite aux corps est omniprésente, comme ce dessin de Georges Scott « La brèche » …
Tableaux, dessins, photographies privées et officielles, articles de presse, films, affiches ou encore objets (mitrailleuses, couteaux pour le corps à corps, cuirasse de tranchée préfigurant les gilets pare-balles, fusil à miroirs pour tirer au-dessus du remblai) reflètent la variété des témoignages.
On est très touché par un petit film, isolé entre deux pans de bois, où l’on entasse dans une charrette, des corps sans vie amenés sans fin par les brancardiers, et par la reconstitution d’un obus éclaté en une miryade de morceaux tranchants rassemblés côte à côte sur une planche.
Parmi les 500 pièces présentées, les œuvres des artistes de la génération du feu, tels les frères Nash, William Orpen, Otto Dix, Ernst Jünger, Guillaume Apollinaire, Anselmo Bucci, Jacques Villon, Fernand Léger ou des toiles d’artistes envoyés au front : Félix Vallotton, Edouard Vuillard et Georges Scott.
Plaisir tout personnel : l’affiche de l’exposition est de Félix Vallotton !
Musée de l’Armée, Hôtel des Invalides – ouvert tous les jours à partir de 10 h., jusqu’au 25 janvier. 8,50€
merci à // Mpbernet