ZTL. À Paris, ces trois lettres font bondir. Elles sont le signe de Zone à trafic limité, la nouvelle brillante idée de la mairie de Paris. Il s’agissait d’une promesse de campagne d’Anne Hidalgo, c’est désormais une réalité. Depuis ce mardi 5 novembre, la circulation est limitée dans les quatre premiers arrondissements de la capitale, excepté au nord des Grands Boulevards, sur les îles de la Cité et de Saint-Louis et sur les quais de la rive droite dans le sens ouest est.
Les conducteurs de voitures thermiques comme électriques (pas de chance !) n’ont plus le droit de circuler librement dans l’hypercentre de Paris sans avoir un but précis. Le site de la ville est on ne peut plus clair : « Seul le trafic ayant pour origine ou destination les rues de ce périmètre est autorisé. À contrario, le trafic de transit (traverser la zone) y est interdit. »
Des ambitions
L’objectif d’une telle mesure est « d’apaiser la circulation et de réorganiser la mobilité en faveur des transports en commun et des mobilités actives ». Dans les faits, il s’agit surtout d’une nouvelle mesure anti voiture signée Anne Hidalgo. À quelques mois de la fin de son mandat et après s’en être prise aux SUV en augmentant démesurément le prix du stationnement de ces véhicules dans les rues de la capitale, l’édile parisienne, qui devrait rejoindre les rangs de Bloomberg, veut une nouvelle fois marquer la première ville de France de son empreinte « écologique ».
Pour ce faire, cette fois, elle a jeté son dévolu sur la ZTL, comme à « Madrid, Milan ou Rome ». En réalité, à Madrid, il n’y a pas de Zone à trafic limité mais une ZBE (Zona de Bajas Emisiones), l’équivalent de la ZFE (Zone à faible émission) française, déjà en vigueur à Paris. Anne Hidalgo a été trahie par son autre patrie. Peu importe, elle voulait sa ZTL et elle l’a eue, même si celle-ci ne rime à rien.
En effet, la Zone à trafic limité de la capitale ne ressemble en rien à celles mises en place dans les grandes villes italiennes ou encore à Nantes, Grenoble et Rennes. Elle est beaucoup plus permissive, très permissive. La mairie de Paris donne « quelques exemples où l’on peut se rendre en voiture dans la zone et y stationner » : « J’habite dans la zone, j’y travaille, j’y effectue des livraisons, j’y réalise une consultation médicale, je réalise une intervention / un dépannage professionnel, je vais dans un magasin / commerce, je vais chez des amis, je vais au cinéma… » Autrement dit, tout est permis ou presque. Résultat : la mesure a un intérêt limité mais surtout, elle est inapplicable.
Pas de réflexion
D’ailleurs, pour le moment, Anne Hidalgo et les siens n’ont pas trouvé comment contrôler les automobilistes et verbaliser les contrevenants, bien qu’une amende de 135 euros soit prévue pour eux. Dans l’arrêté pris conjointement par la ville et la préfecture de police, il est écrit : « Les modalités de contrôle ainsi que la liste des justificatifs permettant d’établir le droit à circuler à l’intérieur de la Zone à Trafic Limité seront définies par un arrêté conjoint de la Maire de Paris et du préfet de police. » On se demande bien quel justificatif pourrait être demandé à quelqu’un qui se rend en voiture au BHV mais repart bredouille ! Et pour un dîner en ville, que faudra-t-il faire pour montrer patte blanche ?
Sous couvert d’offrir aux automobilistes « une phase pédagogique » visant à « accompagner les usagers dans cette transition » et à « s’assurer que toutes et tous comprennent les nouvelles règles de circulation avant l’application complète de ce dispositif », la mairie de Paris se laisserait-elle six mois de plus pour trouver une solution ? Pour l’heure, en tout cas, elles sont toutes plus sottes que grenues.
Le groupe d’opposition Changer Paris n’a pas manqué de le faire remarquer. Dans un communiqué, il pointe du doigt les différentes options envisagées par l’équipe d’Anne Hidalgo dont « un sinistre clin d’œil à la période du confinement COVID, un système d’auto-déclaration » ou la présentation « des tickets d’achats ou des notes de restaurants ». Du papier pour se justifier, question « écologie », peut mieux faire. La ZTL est en place, elle n’est pas au point, elle ne le sera peut-être (sans doute) jamais. D’aucun diront que ce n’est pas plus mal.