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Tribune Libre : Regard sur le terrorisme ordinaire de Y.M Laulan

L’attentat à la kalachnikov qui a entraîné la mort de 21 touristes étrangers le 18 mars dernier au musée du Bardo en Tunisie nous ramène à une triste réalité de notre temps. A cela fait écho l’attentat du 2 avril au Yémen où l’explosion d’une laiterie par des terroristes Houthis  (d’obédience chiite) a provoqué la mort de plusieurs dizaines de personnes1. Puis, tout récemment, ce sont 147 morts au Kénya dans un campus universitaire massacrés  par les islamistes somaliens d’Al-Chebab.

TERRORISME ! BOKO HARAM

TERRORISME ! BOKO HARAM

Que ce soit sous le nom d’Al Qu’Aïda, de Daech ou d’un califat fantôme en voie  de réanimation, le terrorisme  est  sans  trêve  à  la  manœuvre.  Il  fait  désormais  partie  de  notre  quotidien.  Il  s’est terriblement banalisé.  Il  n’est  guère de mois,  de semaine, de jours même que l’on apprenne un attentat  quelque part  dans le  monde ayant  entraîné la  mort  d’un certain  nombre de personnes innocentes, des civils dans la plupart des cas.

 

Certes, le terrorisme est né avec l’homme. Il a toujours existé à l’état latent. Mais il a revêtu des formes très diverses au fil du temps. Il frappait naguère le plus souvent des personnes porteuses de symboles  de puissance ou  de majesté.  Il  s’attaque de nos jours  à  des  foules  anonymes  qui  ont simplement eu la mauvaise fortune d’être au mauvais moment au mauvais endroit.

Tous les grand conquérants ont eu à divers moments   la tentation de recourir  à  la  terreur  pour soumettre leurs adversaires, depuis les  Mongols jusqu’à Guillaume le Conquérant (pour « pacifier »le  Northumberland obstinément rebelle). Mais c’est la secte des « Assassins » qui  porté ce genre de méthode de contrôle des  populations d’un genre un peu particulier  à un niveau de   perfection rarement égalé dans l’histoire.

Rappelons que la secte des « Assassins »2, dont la terreur était l’arme principale, a été fondée au Moyen Orient –ce n’est pas un hasard- par Hassan, un ismaélite d’obédience chiite. Enfermé dans sa forteresse d’Alamout, ce dernier, puis ses disciples, ont  fait régner la terreur pendant pas moins de150  ans  dans  tout  le  Moyen  Orient  parmi  les  dignitaires.  Ces  derniers  vivaient  dans  la  crainte permanente de perdre leur vie aux mains des « fédaviès », les exécuteurs proprement dits prêts à tuer et à mourir.

C’était un moyen de domination politique fort efficace. Jusqu’au jour où les Mongols,excédés, ont mis un terme à leurs activités en leur donnant systématiquement la chasse  afin de les exterminer jusqu’aux derniers. Mais l’on reconnait déjà les caractéristiques des attentats suicides si fréquents de notre  temps.

Ces actes fous sont,  certes, commis par des fanatiques ou des illuminés, au nom de leurs principes,ou au nom de Dieu. Mais quelles qu’en soient leurs motivations, les moyens sont toujours les mêmes,semer  la  terreur  et  intimider  l’adversaire  de  façon  à  le  détourer  de  son  but  ou,  de  l’amener  à déguerpir ou  tout simplement de le faire disparaître.3

Le terrorisme est, par excellence, l’arme des faibles, ceux qui, individus ou groupes, n’estiment n’avoir pas d’autres moyens pour se faire entendre. C’est souvent l’arme du faible au fort, le premier ne reculant devant rien pour faire reculer le second. Son arme principale est l’effet de surprise. Mais ce n’est pas toujours le cas.

Rappelons précisément la « Terreur » pendant la Révolution française qui était bien, n’en  déplaise à nos  amis  socialistes  qui  se  sont  complu  à  la  célébrer  sous  François  Mitterrand-,  un  épisode  de terrorisme  d’  État  symbolisé  par  la  guillotine.  Il  a  été  méthodiquement  appliqué  par  ceux  qui disposaient de la force armée pour combattre leurs adversaires en situation d’infériorité4. Cela été aussi  le   cas  lors  de la  création d’Israël,  comme on  l’a  vu,  bien  qu’il  soit  malséant  de  rappeler aujourd’hui cet épisode peu glorieux qui a marqué la naissance de l’État hébreux.

Comme on vient  de le  voir,  le  terrorisme peut  donc  être  un moyen de poursuivre  une certaine politique (pour paraphraser Clausewitz qui appliquait ce principe à la guerre).  De nos jours, le terrorisme s’est multiplié et modernisé. Il était sélectif. Il est devenu universel. Il était ciblé. Il est devenu aveugle.

Il frappe de tous temps, en tous lieux, le plus souvent par surprise, sous les prétextes les plus divers, des plus raffinés au plus stupides.  5 Pourquoi se développe-t-il ainsi ? René  Girard  nous  explique  que  le  désir  mimétique,  la  volonté  d’imiter,  et  de  rivaliser  est  le fondement de la violence chez l’homme.

Incontestablement le terrorisme actuel comporte un effet d’imitation très accentué. C’est devenu une véritable mode morbide et mortifère. Sinon comment expliquer les motivations de ces hommes et ces femmes qui, les uns après les autres, entourent leur ceinture  d’explosifs pour aller se faire sauter au milieu d’une foule, pour entraîner le plus grand nombre possible de personnes dans la mort ?

Yemen

Yemen

Pour  simplifier  grossièrement,  en  dehors  de l’Afghanistan  et  du  Pakistan,  le  terrorisme intéresse principalement 4 zones, à savoir l’Europe, les États-Unis, l’Afrique et le Moyen Orient. Le terrorisme revêt certes des formes variées selon le lieu,  avec, cependant, une constante : c’est toujours l’Islam qui est à la manœuvre, jamais le christianisme, le bouddhisme, le taoïsme ou le confucianisme. ll faut y voir sans doute un hasard de l’histoire religieuse de l’humanité6.

Quoi qu’il en soit, il semblerait bien qu’aujourd’hui comme autrefois, l’Islam génère la violence et l’intolérance, comme la poule pond des œufs ou le pommier produit des pommes.

En Afrique, l’Islam inspire vaguement le terrorisme local qui y trouve une justification commode. Il relève, en fait, largement du banditisme féroce hérité des guerres civiles et tribales  qui ont marqué la post colonisation et le départ des Européens.

Pour l’Europe et les États-Unis, le terrorisme, toujours, bien entendu, animé par l’Islam, vise moins à déstabiliser  des  sociétés  bien  trop  enracinées  pour  se  laisser  ébranler   par  quelques  tueries occasionnelles  vite  cantonnées  puis  sanctionnées,  qu’à  « punir »  les  infidèles,   les  Occidentaux débauchés bien entendu, et notamment , les communautés juives. Celles-ci  ont l’immense tort d’être fort  bien  intégrées.

Elles  servent  opportunément  de  « boucs  émissaires »  à  des  fanatiques  qui,précisément,  sont  incapables  de  s’intégrer,  les  malheurs  des  Palestiniens  aux  mains  d’Israël  ne servant  que  de justificatif commode. C’est l’esprit de vengeance qui domine ici, l’Islam punitif, une variété fort répandue.

Reste le Moyen Orient devenu le « terrain de jeu » par excellence du terrorisme qui  y  trouve toutes les raisons du monde, conflits entre États,  entre tribus, entre clans, entre religions, de s’adonner librement à son sport favori.  Il consiste à   tuer des gens à coup de bombes, de kalachnikovs ou de mines, au nom d’Allah.

Tous les moyens sont bons.Un facteur dominant néanmoins est la rivalité millénaire entre l’Islam chiite, celui de l’Iran, et l’Islam sunnite, représenté par l’Arabie saoudite et une kyrielle de petits États secondaires ou satellites. On sait que les musulmans chiites sont fortement minoritaires,  15 % pas plus de la population de la région, contre 85 % pour les Sunnites.

Le terrorisme au quotidien, faute de guerres conventionnelles trop lourdes et trop coûteuse,  est devenu le moyen normal d’entretenir des relations ordinaires avec le voisin et de régler commodément  les différends de frontières qui peuvent surgir.Les  deux acteurs  principaux  de  la  région,  les  deux  « poids  lourds »,  sont  donc  l’Iran et  l’Arabie saoudite, l’Égypte ne jouant plus aujourd’hui‘ qu’un rôle plus effacé. Ce sont eux qui mènent et le jeu directement ou par groupes  ou mouvements interposés.

Dans ce cadre régional, le terrain de jeu favori du terrorisme est occupé, au centre, par  trois pays structurellement instables et turbulents, le Yémen, l’Irak, la Syrie ( le Liban auparavant), avec, aux extrémités du périmètre ainsi défini, la Somalie des Chébbabs et l’ Afghanistan des Talibans.

L’objectif de ces mouvements terroristes est  de tenter, à coup d’attentats et de massacres,  de déstabiliser encore davantage des structures étatiques encore faibles et flageolantes. C’est ainsi que le Moyen-Orient,  70 ans après la dernière guerre mondiale, est maintenu dans un état quasi permanent de turbulences  et d’instabilité sans trêve ni repos, une espèce de chaudron infernal où peuvent mijoter à loisir tous les conflits possibles et imaginables entre ethnies, races, religions, clans, tribus et États.

En conséquence, faute d’États solides, stables et structurés  capables de mettre en œuvre une bonne gouvernance,  le Moyen Orient n’a pas été en mesure depuis  1945 d’instaurer  un ordre étatique stable. Dans ce contexte, la religion est devenue un véritable poison culturel qui mobilise toutes les énergies des élites et les détourne de leur véritable tâche 6. Elle serait bien évidemment de mettre en œuvre des politiques de développement  durable au profit des populations qui stagnent dans une pauvreté  abjecte.

Ici,  l’Islam  apparaît,  une  fois  de  plus,  comme  un  obstacle  culturel  quasi insurmontable au progrès et à la modernité7 .De ce fait,  le Moyen Orient accumule au fil des années un déficit culturel  qui paraît de plus en plus difficile  à  combler  en  termes  d’éducation,  d’apprentissage  des  libertés,  et  d’amélioration  de  la condition féminine. A cet égard, dans ces régions, la femme apparaît encore comme un être de statut inférieur,  destiné à être mis étroitement sous tutelle dans le cadre de la famille ou de la société musulmane.

Femmes voilées à Istanbul. (Photo : AFP)

Femmes voilées à Istanbul.
(Photo : AFP)

La femme, et sa place dans  la société,  sont,   en effet, considérées comme le facteur déstabilisant  majeur   susceptible  de  porter  atteinte  à  l’équilibre  des   sociétés  musulmanes traditionnelles.

C’est   notamment le cas en Afghanistan, au Pakistan et même en Égypte. Emanciper les femmes,  c’est  ouvrir  la porte au désordre social,  au dépérissement  des  liens  familiaux voire d’attenter à l’Islam. 8

A vrai dire, l’Europe ou le Moyen Orient n’ont pas l’exclusivité du terrorisme. Il est planétaire. Les pays où les touristes occidentaux peuvent se promener en toute sécurité couvrent un espace qui se rétréci d’année en année. Peu de sociétés, peu de nations  échappent à ce fléau .

Il frappe aussi bien la Chine avec les Ouigours  que la Russie avec les Tchétchènes et maintenant l’Afrique avec Boko Haram ou la Somalie avec les Al-Chebabs . Le terrorisme n’a souvent pas de visage. Ou plutôt , il en a plusieurs. Il en a parfois trop.

Car beaucoup de  ces  mouvements  extrémistes  qui  naissent  et  disparaissent  sans  cesse  relèvent  purement  et simplement d’une démarche proche   d’une anarchie meurtrière, sans objectifs politiques bien définis si  ce n’est  le désir  morbide de tuer  .

C’est  ce qui  rend particulièrement ardue la lutte contre le terrorisme. Il n’a pas non plus toujours de territoire bien défini .C’est bien d’ailleurs l’obstacle au quelles Américains se sont heurtés, en vain, en Afghanistan où le combat opposait  une armée régulière à des guérilleros.

Ceci étant, il faut bien reconnaître que le terrorisme moderne  présente  bien des avantages pour les groupes qui veulent y recourir. Il est  commode , bon marché et quasiment à la portée de tous, car remarquablement économe en termes  de moyens.

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Quelques fusils d’assaut démodés, quelques kilos d’explosifs ramassés achetés pour une poignée de dollars dans  n’importe quel bazar oriental (ou Place Clichy) feront parfaitement l’affaire  du terrorisme ordinaire. Reste à trouver les hommes. Ils ne manquent pas. Ils sont aisés à trouver parmi les centaines de milliers, voire les millions de Jeunes désœuvrés, sans emplois, sans formation ni éducation, sans perspectives qui errent dans les rues de tant  de cités au Moyen Orient ou même dans les rues de nos cités frappées par le chômage.

En effet,  on le  rencontre  aussi  bien chez  nous,  dans nos quartiers  pourtant  dotés  de toutes  les commodités d’un pays moderne9. Ici, la recette est différente. Il suffirait, semble-t-il,  de motiver les candidats au terrorisme par l’apprentissage de quelques versets sommaires soi-disant tirés du Coran,dans la mosquée du coin , en prison ou sur les réseaux sociaux et l’affaire est faite.

On a fabriqué quelques soldats d’Allah supplémentaires  prêts à verser le sang de l’infidèle, celui  qui habite juste à côté 10.A l’inverse, la lutte contre le terrorisme est extraordinairement onéreuse. La guerre en Afghanistan contre les Talibans, guerre au trois quarts  déjà perdue,   a coûté pendant près de 10 ans, aux USA des sommes  fantastiques  et,   fâcheusement,  d’une  efficacité  douteuse :  plusieurs  trillons,  plusieurs dizaines de milliards de dollars.

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Aux terroristes, l’opération n’a pratiquement rien coûté : le coût de quelques heures d’entrainement pour apprendre à piloter des avions gros porteurs : une modeste poignée de dollars. Et pour que résultat magnifique! La destruction des deux tours jumelles du World Trade Center et plus de 2000 morts .

Comble de satisfaction, c’est l’ennemi lui-même, l’Amérique, quia fourni les armes pour mener l’opération à bonne fin : les deux avions de l’American Airlines et de l’United Airlines . On ne peut rêver mieux.

Et, en France, combien va coûter au budget de la défense nationale  le stationnement de quelques 10 000 soldats dans nos rues pendant 6 mois au moins?

Quoiqu’il en soit, il est manifeste que les volontaires  de la mort n’ont guère manqué que ce soit au Pakistan, en Irak ou en Libye ou récemment au Yémen ou au Kénya. Tous les motifs, mêmes les plus futiles, les plus invraisemblables, les plus incompréhensibles  sont bons pour faire périr son voisin.

Le terrorisme frappe ainsi sans discrimination  les Chrétiens que les Musulmans ne supportent pas (en Egypte, au Pakistan et un peu partout au Moyen Orient), les Chrétiens contre les Musulmans (au Mali), les Musulmans entre eux,  Sunnites contre Chiites, bref, tous individus, toutes collectivités quine sont pas en concordance  parfaite avec la communauté dominante à laquelle  appartiennent les terroristes.

Il  atteint,  là  encore  sans  discrimination,  hommes  femmes  et  enfants,  dans  les  lieux  de  passage fréquentés,  ou  les  lieux  de  rassemblement,  marchés,  casernes,  les  lieux  de  prières,  églises  ou mosquées à l’occasion,  sachant bien que pour les auteurs de ces atrocités « Dieu reconnaîtra les siens »11. En l’occurrence, il s’agit d’Allah. Les hommes sont toujours prompts à mettre Dieu au service de leurs crimes. Cela leur sert de justification.

Le terrorisme n’existe pratiquement plus en terres chrétiennes, après, reconnaissons- le , des siècles de sauvageries en tous genres. N’oublions pas la Saint Barthélémy et les guerres de religion qui  ont ensanglanté le sol de l’Europe tout au long du 16° siècle. Là,  il  s’agissait, il  est vrai de faire peur certes, mais aussi purement et simplement d’ éliminer les fidèles de l’autre religion, celle d’en face.

Mais  aujourd’hui  le  terrorisme à  caractère  religieux  est  presque  exclusivement  le  privilège   des Musulmans, ou plus précisément de cette frange extrémiste désignée sous le vocable d’Islam radical.On tue au nom d’Allah plutôt qu’au nom de Dieu. Piètre satisfaction pour les victimes il est vrai.

Il a frappé en France en ce début d’année, aussi en Angleterre en à Madrid précédemment. Mais nos pays ont été épargnés, grâce au Ciel, pour l’instant  de ces machines à tuer en masse que sont  les voitures  piégées. Là,  les  morts se comptent  par  centaines  et  les blessés  par  milliers.  En revanche, on sait s’il en a été fait grand usage ailleurs, en Irak, en Syrie et maintenant au Yémen. Ce sont  des  procédés  d’autant  plus  terrifiants  que la  parade  est  extrêmement  difficile  à  mettre en œuvre,  surtout  dans  des  pays  où  les  ressources  budgétaires  sont  limitées,  les  services  de renseignements rudimentaires et l’appareil policier inadéquat.

Mais, pour l’instant tout au moins, sa terre de prédilection demeure le Moyen Orient, cette zone de turbulences perpétuelles que rien ne semble devoir apaiser12 .  Là, le terrorisme contemporain ne recule devant aucune atrocité, décapitations en série ou à « l’ancienne » ou même le bûcher comme pour ce malheureux pilote jordanien brûlé vif dans une cage de fer. C’est qu’il s’agit de « faire atroce »pour alimenter les images d’épouvante qui iront alimenter les écrans de télévision de par le monde.

La télévision  est devenue un instrument de choix pour le terrorisme à grand spectacle. Sa cible est évidement les téléspectateurs de nos pays qui ne rechignent pas excessivement à se faire peur devant l’écran, pour autant que le coup ne passe pas trop près.

Voilà donc  les fruits amers de ce « printemps » de l’islamisme radical dont nul ne concevait qu’il puisse naître si promptement des cendres du « Printemps arabe » célébré avec bonheur voici peu parles médias extasiés du monde entier. Il est vrai qu’en termes de naïveté la presse occidentale n’a pas son  pareil  au  monde,  toujours  prête  à  prendre ses  désirs  pour  des  réalités.

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Comme si  les  pays étrangers dans le Tiers Monde en quête de changement devaient obligatoirement   s’aligner sur le modèle occidental et emprunter les mêmes cheminements que lui. Cette illusion a nourri toutes les interventions françaises et américaines en Libye, en Irak, en Afghanistan, bref un peu partout où nous avons cru bon de mettre les pieds. Aujourd’hui la Libye attaquée par Nicolas Sarkozy, inspiré par un soit- disant philosophe13, – est en plein chaos.   Al Qu’AAïda s’y taille une place de choix  par la terreur. A quand le tour de la Syrie ?

Dès lors que faire ? Une politique étrangère ne se bâtit pas à coups de bons sentiments  ni de  morale bourgeoise . Un doigt de cynisme teinté d’un soupçon de réalisme ne messied pas. Nous avons voulu combattre le terrorisme en dehors de nos frontières ? Nous l’avons importé chez nous.Pour  être  réaliste  il  faut  prendre conscience,  comme les   présidents  occidentaux,  américains  ou français auraient intérêt à le faire, de la triste leçon des 30 dernières années.

C’est que  le meilleur rempart contre le fanatisme religieux et le terrorisme qui lui est étroitement associé sont ces tyrans laïques ou non, disparus ou toujours en place : Saddam Hussein en Irak, Kadhafi en Libye, Bachar el-Assad en Syrie  14 .

Inspirés  par  une  bonne conscience bourgeoise inepte  nourrie de nos chères valeurs et un aveuglement naïf, nous avons cru indispensable  de les  faire disparaître ou d’envisager de le faire. Pour mieux voir fleurir les pires atrocités sur leurs ruines. Beau travail …Après tout, Mustapha Kemal, qui n’était pas un tendre, lorsqu’il a voulu faire de la Turquie un pays moderne, n’a rien trouvé de mieux que d’imposer la laïcité de gré ou de force,  en employant la manière forte à l’occasion, si  nécessaire pour éliminer ou plus précisément, cantonner un Islam à l’époque omniprésent.

Et cela a marché. A l’inverse, avec Erdogan, le Premier Ministre turc actuel,l’Islamisme militant, et donc  intolérant, est en passe de reconquérir le terrain perdu.  Sur  le  plan  intérieur,  la  tâche  n’est  guère  facilitée  par  la  présence,  bâtie  par  nous  -mêmes,  de communautés plus ou moins soumises à l’influence de l’Islam, et donc susceptibles à tout instant de dériver marginalement, pour des raisons circonstancielles, vers un radicalisme dangereux.

Mais il est vrai  que  nos  sociétés  ne  sont  pas  sans  défense  ni  dépourvues  de  moyens  techniques  efficaces susceptibles d’être mis en œuvre pour contenir la menace.

Reste qu’un équilibre toujours délicat est à observer entre sécurité et liberté. Dans des cas extrêmes,il est assuré que l’opinion sera prompte à renoncer aux libertés en faveur de la sécurité, tant il est vrai qu’aucune société moderne ne peut vivre en permanence dans la crainte quotidienne d’un attentat.

Les Pieds Noirs en Algérie pendant la guerre  et les Israéliens de nos jours ont connu et connaissent encore ce genre de situation intolérable et difficile à vivre. Il est aisé de prêcher à autrui la morale et la modération à distance dans l’espace et dans le temps.

Sur le plan externe, l’intervention en Afghanistan est l’exemple de ce qu’il ne faut pas faire. Après les Russes, les Américains s’y sont cassés les dents et les Talibans sont déjà de retour. L’exemple à suivre vient peut-être, pour une fois, de la Russie soumise au terrorisme tchétchène. La solution a consisté à mettre  en  place  un  gouvernement  tchétchène   musulman,  parfaitement  étranger  à  toutes  nos normes habituelles de la démocratie.

Il est odieux, bigot, arriéré et féroce. La condition féminine y est détestable.  Mais  le  gouvernement  de Ranzan A .  Kadyran maintient,  d’une poigne de fer,  l’ordre interne et la paix  avec la Russie. Il  n’y a plus d’attentats terroristes. Le pouvoir russe  ne lui en demande pas plus.

Faisons- en autant. Cessons de vouloir à tout prix implanter la démocratie et les libertés publiques et privées dans des sociétés où elles ne peuvent manifestement pas germer15. Il faut pratiquer le droit de non-ingérence,  l’anti- Bernard Kouchner16 en quelque sorte.  Nous  ne nous en porterons que mieux.

A cet égard, quelle bourde historique magistrale le fameux Laurence d’Arabie a commise dans les années 20 pour aller fédérer les tribus de la péninsule arabique pour les libérer de la tutelle turque  !

Cet agité –le Bernard Henri Levy de l’époque- aurait bien mieux fait de les laisser tranquilles et se débrouiller  toutes  seules.  Nous  aurions  aujourd’hui  un  Moyen  Orient  beaucoup  plus  serein  et paisible. Car, après tout, quel décret divin, quel ordonnance venue du ciel ont fait de nous les justiciers et les réformateurs de tous les pays du monde ? Devons-nous modifier, formater le monde entier à l’image de nos principes, de notre droit, de nos valeurs, de nos habitudes et de nos coutumes  ? C’est ici que l’arrogance naïf de l’Occident montre son vrai visage, celui de l’innocence.

Il faut s’y résigner : le monde à l’image de l’Occident, dans ses vertus et ses faiblesses, n’est pas pour demain, n’en déplaise à Francis Fukuyama, dont le livre ,  « La fin de l’histoire », constitue la plus fabuleuse pitrerie intellectuelle des temps modernes.

Il  n’est  pas étonnant qu’il  ait  connu un tel succès de libraire. L’esprit de l’homme éclairé est toujours friand de balivernes.

Y.M.Laulan

 

 

 

1 Les Sunnites n’ont pas manqué de répliquer promptement en faisant sauter deux mosquées

2 Dénomination dérivée du haschich, drogue qui était supposée donner du courage aux exécuteurs de basse œuvre.

3 C’est bien la politique menée avec succès par les colons juifs contre les Palestiniens résidents dans les débuts de la création de l’État d’Israël. Il est vrai qu’ils avaient Dieu, enfin Yahvé, avec eux , ce qui justifiait tout.

4 En Vendée notamment

5 On dit les Kalachnikovs sont également  aisément disponibles à Clichy  dans des conditions parfaitement raisonnables. Nous voilà rassurés.

6 Ici attention lecteur : « pas damalgame » et pas de « stigmatisation ». Vous avez bien lu..

7 Le véritable Islam paisible et modéré est encore à inventer, au prochain millénaire sans doute. Petit problème : à la fin du XXI° siècle, les Musulmans formeront les 2/3 de la population mondiale. Cela promet.

8 Il faut bien reconnaître que le spectacle fort peu édifiant de nos mœurs  en Europe et aux États-Unis ne plaide guère en faveur de l’amélioration de la condition féminine dans ces pays.

.9 C’est bien le cas des frères Kouachi et d’Amedy Coulibaly pour les  attentats du 7 au 9  janvier 2015 à Paris

10 Il est clair qu’en l’occurrence, cet Islam rudimentaire sert pour l’essentiel d’anesthésiant pour des esprits sommaires manifestement peu portés, on s’en doute, à l’examen de conscience et à l’auto critique.

11 On a reconnu la fameuse réplique de Simon de Montfort au siège de Béziers.

12 Il est dérisoire d’évoquer les extasiés du « printemps arabe » qui allait enfin, selon nos médias, ramener  la démocratie, la paix et la sérénité dans ces régions du monde.

13 J’ai nommé  le fameux BHL, Bernard Henri Levy, perpétuellement en quête de célébrité médiatique.

14 Il n’y a pas si longtemps, François Hollande, toujours en retard d’une guerre, voulait absolument pousser Barak Obama à bombarder Damas. Heureusement que ce dernier, qui a de meilleurs conseillers et de bien meilleurs services de renseignements, s’est bien gardé de suivre ce conseil inepte.

15 Les malheureux Américains, qui ne doutent de rien, ont ainsi hardiment entrepris de libérer la condition de la femme en Afghanistan. Noble tâche, manifestement vue à l’échec, dans les pires conditions pour les infortunées, dès lors  que les Talibans auront repris le pouvoir. C’est pour bientôt.

16 Après avoir prêché le droit d’ingérence ce dernier, plus sagement, est parti faire fortune dans l’immobilier. Cela lui réussit mieux, semble-t-il.

image à la une #SYRIE: règlement de compte entre fractions rivales terroristes dans la province d’#Idleb

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