L
|
es Parisiens seuls le connaitraient ils encore, sans le rattacher à rien? Comment une association a su éviter la démolition de la demeure d’une grande famille éteinte, et faire revivre ce nom.
Le domaine de Maubourg, à mi-chemin entre Saint-Étienne et Le Puy, sur la commune de Saint-Maurice-de-Lignon, est le berceau d’une importante baronnie diocésaine du Velay à partir du XVIe siècle, qui englobait également le château de La Tour et Sainte-Sigolène.
L’importance du site tient, entre autres, à ce qu’il se situait sur une voie reliant Retournac sur les bords de la Loire à Saint-Pierre-de-Bœuf sur les rives du Rhône. « L’allée historique » qui mène à l’entrée principale du château est une infime partie de cette ancienne voie.
L’importance du site tient, entre autres, à ce qu’il se situait sur une voie reliant Retournac sur les bords de la Loire à Saint-Pierre-de-Bœuf sur les rives du Rhône. « L’allée historique » qui mène à l’entrée principale du château est une infime partie de cette ancienne voie.
Il en reste un ensemble de parcs (« grand parc et petit parc ») de 33 hectares, entouré d’un mur de pierres, qui comprennent plusieurs arbres remarquables, un hêtre de quatre siècles et deux chênes de plus de trois siècles. Le petit parc a été édifié sur les plans d’un paysagiste anglais du début du XIXe.
Les bâtiments consistent en une tour, vestige de l’ancien château, une glacière, construction assez rare dans cette partie de la France, une orangerie, édifiée au XVIIIe siècle par le Maréchal de la Tour-Maubourg et le château, composé de quatre bâtiments entourant une cour rectangulaire. Le château, la tour, la glacière, l’orangerie ainsi que la chapelle funéraire du cimetière de Saint-Maurice-de-Lignon ont été inscrits sur l’inventaire supplémentaire des monuments historiques en 2007.
L’entrée d’honneur se trouve sur la façade ouest. À gauche se situe le grand escalier puis, dans l’aile nord, les pièces de service. À droite de l’entrée, des salles de réception : une antichambre, la salle à manger, une suite de trois salons, une grande pièce et la bibliothèque sur la façade est. Sur cette même façade est, après un passage vouté permettant l’accès à la cour intérieure, se trouve la chapelle.
À l’étage, au-dessus des salles de réception se trouve la chambre du marquis suivie par la chambre de Lafayette, des chambres d’apparat et des salons, et à l’angle de l’aile sud et de l’aile est, la chambre de la marquise. Les décors antérieurs aux transformations du XXe siècle menées par les Houillères de la Loire ne subsistent que dans la bibliothèque, la grande salle et la chapelle. On peut également admirer les cheminées et les parquets en orme ou en merisier.
Ce château a été édifié au début du XIXe siècle. L’ancien château, détruit sous la Révolution, se composait de trois tours (la plus ancienne devait remonter au XIe siècle) et de corps de bâtiments. Les générations qui s’y sont succédé recouvrent deux familles, les Malet pendant le Moyen Âge, puis les Faÿ, à partir du XVIe siècle.
DES ORIGINES AU XVIE SIÈCLE : LE TEMPS DE LA FONDATION
Nous disposons de peu d’information sur les origines du fief de Maubourg. Au xie siècle, la famille Malet en rend hommage à l’évêque du Puy mais les origines du site sont beaucoup plus anciennes. Un membre de cette famille, Étienne Malet sera Abbé de La Chaise-Dieu de 1347 à 1350 puis évêque d’Elne en 1350 et 1351 et enfin de Tortose de 1351 à 1356.
En 1527, Marguerite, dernière descendante de la famille Malet, épouse Christophe de Faÿ, petit-fils d’un Chambellan du roi Charles VII. Telle est l’origine des Faÿ de la Tour-Maubourg (nom orthographié également Faÿ de Latour-Maubourg).
Les Faÿ constituent une très ancienne famille originaire des confins du Velay et du Vivarais ; certains de ses membres participeront à la 1re Croisade. La branche aînée s’éteint avec Philippa de Faÿ, mariée vers 1185 à Aymar de Poitiers, comte de Valentinois. Mais de nombreuses branches cadettes subsisteront.
Arnaud de Faÿ, seigneur de Chapteuil épouse en 1320 l’héritière de Peyraud et sera le père de Guillaume, Seigneur de Chapteuil et de Peyraud, grand bailli du Vivarais et du Forez, maître d’hôtel du duc d’Anjou, tué à la bataille de Brignais en 1361. Ses descendants sont à l’origine des Faÿ-Peyraud et des Faÿ-Solignac. Arnaud aura un autre fils, Raymond, bisaïeul d’Artaud, Seigneur de Lherm et de Saint-Quentin, Chambellan du roi Charles VII. Artaud est à l’origine des Faÿ-Gerlande et des Faÿ de Latour-Maubourg.
Une vingtaine de Chevaliers de l’ordre de Saint-Jean de Jérusalem sont également issus de la famille et beaucoup laisseront leur vie au cours de combats. Deux d’entre eux occuperont l’importante fonction de Grand Prieur d’Auvergne, Pons de Faÿ en 1309 et Raynaud de Faÿ de 1347 à 1351.
Quant à Marguerite, charitable, mais trop zélée aux yeux de son mari, une tradition longtemps orale rapporte l’événement suivant : Un matin de janvier, Marguerite sort de bonne heure porter des provisions à une famille nécessiteuse. Chemin faisant, elle se retrouve face à son mari, parti chasser. Interrogée sur ce qu’elle transporte sous son manteau, elle répond, troublée : « Oh, ce ne sont que quelques fleurs ». À ce moment-là, une brassée de roses et de marguerites tombent au sol, embaumant l’air de leur parfum !
Un événement proche se retrouve dans la vie de Sainte Élisabeth de Hongrie. Marguerite aurait été enterrée sur les lieux du miracle. La chapelle, reconstruite au xixe siècle, existe toujours, assez éloignée du château.
À la génération suivante, Jean de Faÿ de la Tour-Maubourg, Sénéchal du Velay et Maréchal Général des Logis de la cavalerie de France sous Charles IX organisera la défense de la ville du Puy-en-Velay contre les armées protestantes du Baron des Adrets. Son épouse, Marguerite du Peloux, lui donnera treize enfants.
XVIIE SIÈCLE : L’ÉGLISE ET L’ORDRE DE SAINT-JEAN DE JÉRUSALEM
Par la suite, Maubourg recevra à plusieurs reprises la visite de Saint Jean François Régis, « une sainte amitié l’unissait aux la Tour Maubourg ». Un des fils de la famille de Maubourg aurait par la suite bénéficié d’une guérison devant la tombe de Jean François Régis.
À la fin du XVIe siècle Jean de Faÿ est évêque de Poitiers de 1571 à 1577 et au début du XVIIe siècle, Paul Antoine de Faÿ de Peyraud est évêque, d’Uzès de 1621 à 1633. Deux autres membres de la famille (prénommés Guillaume et Nicolas) seront prieurs de Chamalières et un autre, Jean de Faÿ de la Tour-Maubourg, chevalier de Malte sera Grand Bailli de Lyon de 1644 à 1650. Deux membres d’une autre branche de la famille, Juste et Charles de Faÿ de Gerlande, chevaliers de Malte seront également Grand Bailli de Lyon, le premier de 1633 à 1644, le second de 1660 à 1666. En 1642, le Grand Bailli de Morée (Péloponnèse), Jean de Faÿ de Peyraud (autre branche de la famille…) est tué dans un combat contre les Turcs.
Jean Hector de Faÿ de la Tour-Maubourg, dit « Le Commandeur de Latour » sera un des plus célèbres chevaliers de Malte de son époque. Commandeur de Chambéry et de Sète, il commande en 1667 un bataillon de 400 chevaliers de Malte au siège de Candie. Il en a laissé une citation manuscrite. Par la suite, il dirige les troupes de l’Ordre de Malte associées à celles de la République de Venise et des États pontificaux en Morée. Il sera tué dans un siège victorieux à Coron en 1685 ; il est enterré dans la cathédrale Saint-Jean Baptiste de La Valette. En 1462 un membre de la famille Faÿ, commandant les troupes de l’ordre de Malte, avait déjà été tué au cours d’un combat victorieux contre les Turcs en Morée, ce qui fera dire plus tard : « On se demandait ce qui était le plus fatal, la Morée à la famille de Faÿ ou la famille de Faÿ à la Morée ».¢
Françoise Buy Rebaud
image à la une-Le Centenaire, avenue de la Tour-Maubourg