Les pauvres ont bien l’impression qu’on se fout de leur gueule
On va donner des bonus pour les voitures propres, a déclaré, royale, Ségolène. Voilà une idée qu’elle est bonne, aurait dit Coluche.
On va encourager l’achat de voitures moins polluantes !
Avant d’aller plus avant sur ce projet, remarquons que lorsque Serge Dassault donne son argent pour acheter des voix, c’est un délit, quand Ségolène donne notre argent pour acheter les voix des Verts, c’est de la politique ! Mais c’est un autre débat.
Sans rentrer dans le détail des bonus prévus, on peut constater qu’une Toyota Prius hybride (non rechargeable), à plus de 30.000 €, va bénéficier de 2.000 €, alors qu’une Citroën C1 diesel n’aura rien du tout. Normal, vous dites-vous ? Sauf que la petite Citroën, qui coûte moins de 15.000 €, rejette moins de gaz à effet de serre que la grosse Prius.
Donc, à pollution égale, nos gouvernants adorés préfèrent aider celui qui peut payer une voiture 30.000 € plutôt que celui qui ne peut s’acheter qu’une petite voiture !
Si vous avez une voiture diesel de plus de treize ans à échanger contre une voiture neuve, c’est le jackpot, le bonus peut atteindre 10.000 €. Mais là encore, deux bémols :
Les gens qui ont des diesel de plus de treize ans ont rarement 20.000 € à mettre (30.000 € moins 10.000 € de bonus) dans une voiture neuve, ils se préparent plutôt à acheter une autre diesel de 6 ou 7 ans.
L’énergie « grise », celle qu’il faut pour fabriquer une voiture, de l’extraction des minerais à la peinture et au transport, correspond, très grossièrement, à ce que consomme la voiture en 100.000 km. Sans entrer dans le détail, avec des hypothèses d’utilisation moyenne, il faut au minimum 5 ans pour que le remplacement d’une voiture de treize ans consommant 8 litres aux cent kilomètres par une hybride consommant 4 litres aux cent ne devienne « rentable » au point de vue des rejets de CO2.
Et là, ceux-là mêmes qui nous rebattent les oreilles avec l’obsolescence programmée nous somment de nous débarrasser de nos voitures – nos vieilles voitures dont l’obsolescence est si mal programmée qu’elles sont devenues quasi increvables.
On avait déjà durci les contrôles techniques pour empêcher les vieilles voitures de rouler, on avait déjà augmenté considérablement le prix des cartes grises pour pénaliser les vieilles guimbardes avec de gros moteurs, les seules qu’on trouvait encore pour pas trop cher (ça, c’était pour construire des tramways, le « must », un tramway !), les pauvres continuaient à rouler ! On a des amendes dissuasives : une prune dans un budget serré, ça fait mal, mais ils continuent à rouler !
Ils vont voir ce qu’ils vont voir, l’Hidalgo s’en occupe, on va interdire aux pauvres de rentrer dans Paris, voilà !
C’est curieux, nos gouvernants ont beau leur dire que c’est pour leur bien, pour qu’ils n’aient pas d’accident, pas de maladie, les pauvres ont bien l’impression qu’on se fout de leur gueule et que la vérité, c’est qu’on ne veut pas les voir. C’est fou, l’instinct que ça a, ces gens-là !
Yann Sergent
Vétérinaire
Source Boulevard Voltaire