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[Expo Photo] Alexis Pichot « Mon coeur en hiver / Insula » Little Big Galerie.

« Mon coeur en hiver »

Cette série photographique, c’est une création au coeur de ma désilusion, une désillusion concernant mon voyage aux îles Lofoten, un voyage qui a été à la fois une épreuve et un apprentissage. Au commencement de belles intentions : partir en train pendant plusieurs jours dans le but d’aller au nord du cercle polaire en Norvège, par conscience écologique et par amour de l’aventure. L’envie était là : me réjouir de photographier des paysages somptueux. En dehors de l’organisation assez difficile avec une multitude de trains à réserver, j’ai adoré prendre ce temps comme partie intégrante du voyage. Une fois sur place, j’ai loué un van aménagé dénommé Thor. Pour info, Thor est le dieu le plus puissant de la mythologie scandinave et ses pouvoirs sont liés au ciel. Il utilise la foudre et apaise ou excite les tempêtes. Une image qui annonça la suite puisque c’est bien là où le bât blesse, la météo a été mauvaise, jour après jour. Le premier jour, je suis au volant de Thor, heureux à la perspective de cette semaine malgré le froid et la neige qui tombe. Cette joie ne durera pas longtemps avec la pluie battante du lendemain et une température autour des 2°c pour le reste de la semaine. Chaque journée a connu son lot de difficultés, liées majoritairement à la météo : vent violent, averse de pluie, froid humide, tempête de neige…

Me voilà bloqué dans mon van à regarder les paysages défilés, pendant de longs moments et cela presque pendant la majorité du temps. J’avais prévu de randonner, d’aller à la rencontre de la nature, de m’isoler avec elle et de photographier la douceur de son intimité…mais, de ma perspective, une forme plus hostile d’intimité s’était présentée à moi. Je sentais mon moral diminué et malgré tout je continuais à rouler, à observer et espérer (ou pas) qu’un tableau photographique se pré- sente à moi. La patience porta ses fruits car par la persévérance de mon observation, je voyais des contrastes évoluer, des nuances de couleurs apparaître, des lumières percer les nuages et recomposer le paysage… Tel des shoots d’endorphine, je sautais sur mon appareil photo pour immortaliser ces moments d’excitation en moi. Ces instants si courts soient-ils me remplissaient de joie et réchauffaient mon coeur en hiver. Ce voyage voyait mon esprit dans le brouillard, mon esprit ne savait plus où aller et j’avais hâte d’en sortir. Malgré tout, j’avais la certitude qu’une histoire apparaîtrait. Et cette histoire est bien celle d’une aven- ture dictée par la foudre de Thor où j’ai dû oeuvrer, seul, au milieu de mes émotions.

Au coeur de notre cerveau se situe l’insula, un organe considéré comme le lieu de naissance des émotions. En latin, insula signifie île, qui se situe au milieu de l’eau. Je suis sensible à ce mot car l’eau représente un élément important pour moi. Être entouré d’eau me fait sentir profondément vivant, connecté, présent. Je sais que mon corps, constitué majoritairement d’eau, à engranger dans chacune de mes cellules les émotions que j’ai pu vivre au bord de l’eau, parfois douces ou tumultueuses. Par la création de ces images, j’ai voulu exprimer le besoin que j’avais de vivre ma relation à l’eau autrement, en tête à tête, d’elle à moi, sans personne, sans un bruit humain. Je me suis alors isolé la nuit, seul avec la nature, une façon pour moi decréer une relation intime avec mon environnement.
Alexis Pichot

Après 10 années dans la décoration d’intérieur à Paris où Alexis Pichot a formé, aiguisé ses perceptions des volumes, des perspectives en architecture; de la lumière et son spectre de couleurs, il s’est lancé en autodidacte dans la photographie. Depuis 2013, il a officialisé son activité en explorant, de nuit, les villes et ses ruines industrielles, par l’utilisation du procédé photographique de temps de pose long. Cette technique a répondu à sa nécessité de ralentir, de prendre le temps, de s’éloigner du tumulte diurne de la ville. Ainsi, il a exercé ses lumières électriques, lors de ce procédé photographique, afin de réinterpréter l’espace et d’y dessiner une nouvelle histoire. Après quelques années, ses sens se lassaient de ces dégradés de gris, de ces odeurs de bitume, de la dureté du paysage… Alors un nouvel appel montait en lui, celui de la forêt. Alexis avait besoin de vivre une expérience forte, loin de toute forme humaine et se confronter à un autre réel. De là, est née sa série «Marche Céleste» où il est parti seul, sur un total de plus de cinquante nuits, dans la forêt de Fontainebleau. Il a continué ses explorations en nature, en racontant ses immersions nocturnes, dans différents milieux naturels par la création de séries photos et vidéos. Petit à petit, naissait de nouveau en lui un besoin fort de faire évoluer sa photographie, de faire évoluer qui il est. Alexis Pichot voulait continuer à donner de plus en plus de sens, de fond à ses sujets et à aborder une imagerie qui puisse lier son regard artistique à l’impact d’une réalité crue. Alors il sort de sa zone de confort, de sa solitude, en allant à la rencontre des personnes qui militent pacifiquement en s’installant dans le coeur des arbres, pour empêcher que ceux-ci soient abattus pour le projet autoroutier de l’A69. Ces personnes sont surnommées les écureuil.les. Telle une résurgence, l’appel de la forêt ne cesse de résonner comme une de nos sources de survies. La préserver est une action écologique et aussi politique.

www.alexispichot.com

ALEXIS PICHOT

« Mon coeur en hiver » / « Insula »

Derniers jours ! Jusqu’au 24 décembre 2024

LITTLE BIG GALERIE

45 rue Lepic      75018 Paris

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