Les ventes de Playboy, du temps de sa gloire dans les seventies du siècle d’avant, pouvaient culminer à sept millions d’exemplaires, sans même compter les éditions étrangères ; et sans oublier aussi les produits dérivés, les clubs dont les serveuses n’étaient souvent vêtues que de leur simple vertu. C’était encore l’époque où un Jimmy Carter, président alors en exercice, avouait au journal fondé par le nabab Hugh Hefner (aujourd’hui 89 printemps au compteur) avoir souvent trompé son épouse en feuilletant les pages humides de mauvaises pensées du magazine en question.
Seulement voilà, tout cela appartient désormais au passé. Les ventes sont tombées du plafond au plancher, écoulant péniblement quelque 700.000 exemplaires mensuels. Certes, il reste encore la Chine, où Playboy réalise 40 % de son chiffre d’affaires en fringues, parfums, bimbeloterie et autres alcools, alors que ce journal y demeure toujours interdit, pudibonderie maoïsto-capitaliste oblige, on imagine…
Du coup, tel le phénix renaissant de ses cendres et la vérité sortant nue du puits, le machin devrait survivre. À ce détail près que ce qui sortira du puits plus avant évoqué sera tout, sauf à poil. Eh oui, c’est ainsi : dans le Playboy new look, les dernières donzelles exhibées seront désormais tenues de se rhabiller de haut en bas. Comme on dit dans ce genre de presse, l’affaire perd un peu de son charme.
Remarquez, Playboy ne fait que finalement suivre la marche du monde. Rien qu’en France : des socialistes boudent le peuple et rallient la société de marché après en avoir fait de même de l’économie de marché. Des républicains qui, se voulant gaullistes, dégagent la dernière playmate se réclamant, même maladroitement, des mânes gaulliennes. Des écologistes parlant tout, hormis d’écologie. Et un Front national qui n’en finit plus de brouiller les cartes, comment voulez-vous que les élites qui nous gouvernent s’y retrouvent ? En s’abonnant à Penthouse, grand rival de Playboy, mais lui aussi au bord du gouffre…
Mais il y a toujours moyen de s’en sortir. D’où ces quelques suggestions :
Playboy veut devenir un journal bien comme il faut ? Qu’il mette Christine Angot en une, mais vêtue de pied en cap – il y a tout de même des limites à la décence – et Alain Minc en pages intérieures ; en slip kangourou, tant qu’à faire, histoire d’égayer les longues nuits de nos chauffeurs routiers, qui pourront punaiser le bidule dans la cabine de leurs 36-tonnes.
Dans la foulée, la presse économique pourra toujours augmenter ses ventes avec un poster détachable de Laurence Parisot en string. En attendant que La Revue des deux mondes prenne la relève du Sun anglais, avec sa pin-up du jour, miss gros seins, naguère exhibée en page trois de cet aimable torche-fesses.
Ce grand chambardement, y sommes-nous déjà ? Peut-être pas. Mais force est de constater que nous n’en sommes pas loin.